Religion

Niché au sommet d’une légère côte, juste après l’entrée de la ville, le Prieuré de Saint-Germain-des-Fossés apparaît comme une vision miraculeuse. Joyau architectural de la ville, ce site clunisien de la seconde moitié du XIIe siècle abrite depuis le début des années 2000 une communauté de religieux, les frères de Saint-Jean.

Une petite communauté guidée par sa foi

Au nombre de 6, ses membres partagent leur temps entre leurs fonctions de curé et la vie communautaire. Ceux que l’on surnomme les « petits-gris » en référence à la teinte anthracite de leurs soutanes, tentent tant bien que mal d’animer le quotidien d’une communauté qui se dépeuple de ses fidèles.

Frère Marie-Géraud accompagné de frère Jean de Dieu. En dehors de l’accueil, ils sont avant tout curé de leur paroisse.

Le prieur, frère Marie-Géraud, met d’ailleurs l’accent sur ce qu’il considère être sa mission principale : porter la bonne parole. « Ma première tâche est celle de curé de la paroisse de Saint-Germain. Je suis tenu de célébrer les offices, de consacrer baptêmes, mariages et enterrements. »

Un travail de plus en plus difficile à accomplir face à la désertion des bénévoles et des fidèles. « Nous savons bien que la place sociale de l’Église n’est plus ce qu’elle était. » constate t-il, lucide. Mais pas découragé. « C’est à nous de faire vivre l’endroit. En relancant l’intérêt pour le lieu, on ramènera du monde. »

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D’où la mise en place d’actions culturelles en lien avec l’histoire du prieuré. « Il faut essayer de lier le culturel au cultuel.  On invite les gens à faire un petit bout de chemin vers nous. À mon arrivée, je me suis rendu compte que certains saint-germanois ne se doutaient même pas de l’existence du site. » Le rapatriement de la Pietà en est le symbole. « La boîte des intentions de prières est pleine et les cierges sont brûlés. Ce qui me fait penser que l’opération a son petit succès. »

Les escaliers en fer forgé du XIXe qui mènent aux chambres.
 

À cela s’ajoute une mission d’accueil. Dès qu’on leur en fait la demande, les moines ouvrent les portes de leur prieuré aux âmes en quête d’une retraite spirituelle.

Sans notre esprit de communauté, cela perdrait un peu de son intérêt.

À Saint-Germain, les chambres sont spartiates, les parties communes sans fioritures. Avec pour toute décoration un crucifix et quelques icônes, elles se composent d’un ou deux lits, d’un petit bureau et d’un évier. Comme le reste du lieu, elles invitent à l’introspection. « Les retraitants viennent surtout chercher un temps de paix. Ils veulent pouvoir mener une réflexion sur des sujets intimes qui touchent à leur vie personnelle et à leur foi. »

Le salon du bâtiment principal du prieuré. Le prieur s’y entretient avec les retraitants en quête de conseils.

À se demander quelle place occupent les religieux dans tout ça. « Sans notre communauté, l’endroit manquerait de chaleur. Nos hôtes nous sollicitent pour des conseils. On intervient seulement lorsque le sujet concerne leur vie spirituelle. Au-delà de ça, nous vivons de vrais moments de convivialité avec eux. »

Même si, comme pour les temps de prière, le silence reste la norme dans la plupart des activités au sein du prieuré. Une manière de préserver la tranquillité des lieux et le receuillement des fidèles.

Un frère parmi les autres

Le frère Marie-Géraud devant la porte du bâtiment principal.

Une hospitalité avec quelques contreparties. « On partage aussi les corvées ! On sollicite nos pensionnaires pour qu’ils nous aident à faire la vaisselle. Mais on ne les force jamais à rien, bien entendu. »
Sur place, on est effectivement totalement libre de déambuler, d’explorer les recoins d’un domaine ancestral. Invité à se servir dans les bibliothèques autant que dans le garde-manger, on aurait presque l’impression d’être un frère de Saint-Jean à part entière.

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Une sens de l’accueil rare qu’entend bien maintenir Marie-Géraud. « Ce sont les repas partagés, les temps de prière en commun qui nous donnent un esprit de corps. La vie fraternelle est le socle sur lequel repose notre vocation. »
Une fois la nuit tombée, une douce quiétude s’empare des lieux. Loin du tumulte du quotidien, seuls subsistent les craquements d’une bâtisse centenaire. Bercées de silence, les pensées vagabondent. Avec le sentiment d’être hors du temps.

La Pietà de Saint-Germain, symbole de la politique culturelle du prieuré.
Élément fort de la paroisse, la Pietà de Saint-Germain trône fièrement au milieu d’une dizaine de plaques d’ex-voto. Initialement installée à l’église du centre du village, qui lui doit son surnom de « basilique », cette vierge de pitié aurait été retrouvée dans l’Allier par des mariniers au XIXe siècle. « Je trouvais qu’elle s’intégrait mieux au prieuré qu’à la basilique. Le prieuré est son véritable écrin », confie frère Marie-Géraud.
Ce rapatriement est le symbole de la volonté du prieur de « lier le culturel au cultuel. En relançant l’intérêt pour le lieu, on ramènera du monde. À mon arrivée, certains Saint-Germanois ne se doutaient même pas de l’existence du site. »

 

Paul Inaudi ; Photos : Dominique Parat

Religion – 24 heures avec les frères de Saint-Jean au prieuré de Saint-Germain-des-Fossés (Allier)