Riad Sattouf au JDD : « Ce sont mes histoires qui décident d’être racontées »

Pas facile d’interviewer quelqu’un qui a déjà raconté toute sa vie dans ses livres. C’est le cas de Riad Sattouf, auteur aux multiples facettes qui, depuis 2014, raconte son enfance entre la Syrie et la France dans sa série d’albums L’Arabe du futur (Allary ­Éditions), dont le sixième et dernier tome vient de paraître. Une histoire qui commence en France, en 1978, à la naissance du petit Riad, d’un père syrien, docteur en histoire à la ­Sorbonne, et d’une mère bretonne. Il est encore tout petit quand la famille part vivre à Tripoli, en Libye, où le père de Riad a décroché un poste d’enseignant. Et pas beaucoup plus grand quand ils s’installent finalement en Syrie, dans le village natal de son père, près de Homs.

C’est là que Riad est scolarisé, dans une école où l’on distribue plus facilement les punitions corporelles que les bons points. À l’âge de 12 ans, il rentre en France, en ­Bretagne. Mais la vie d’une famille multiculturelle où les questions de religion, d’indépendance et d’argent sont nombreuses n’est pas de tout repos. Et les parents de Riad finissent par divorcer. Ça ne se passe pas bien : le père de Riad enlève le plus jeune de ses frères et l’emmène en Syrie. Riad, sa mère et son autre frère sont désemparés. « Mais n’en dites pas plus, il ne faut pas divulgâcher la suite du récit », nous demande l’auteur, attablé dans un café du Marais à Paris. Une suite attendue impatiemment par les 3 millions de lecteurs de sa série, traduite dans une vingtaine de pays. Un succès parmi d’autres pour ce touche-à-tout à qui tout semble réussir : Les Cahiers d’Esther, sa BD qui raconte la vie d’une jeune fille entre ses 10 ans et ses 18 ans, ou encore ses projets au cinéma (il a réalisé le film Les Beaux Gosses en 2009 et en prépare un avec Les Inconnus pour 2023). Rencontre avec un auteur atypique et touchant, au regard ironique mais jamais désabusé sur notre société.

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Le sixième et dernier volume de L’Arabe du futur vient de paraître. Vous pensiez avoir autant de choses à raconter quand vous avez écrit le premier ?
Comme c’est mon histoire personnelle, je savais où j’allais et comment j’allais finir. Mais au départ je ne pensais faire que trois tomes. Et puis, très vite, à partir du volume 2, c’est comme si l’histoire avait fleuri. La plante était plus grande que ce que j’avais imaginé en la plantant et elle a commencé à pousser de manière plus vive. Ce sont mes histoires qui décident d’être racontées, ce n’est pas vraiment moi qui choisis. J’essaie de tailler les feuilles pendant qu’elles poussent, mais c’est tout ce que je peux faire ! Ce dernier volume a été plus compliqué que les autres à écrire. Jusque-là, je faisais un découpage très précis de l’histoire, mais là, non, tout est venu au fil des pages, presque en écriture automatique !

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Ce sont mes histoires qui décident d’être racontées

Vous disiez que vous attendiez d’avoir les six tomes pour tout faire traduire en arabe. C’est désormais prévu ?
C’est plus ou moins en cours, oui. Mais ce n’est pas plus important qu’une autre langue, parce qu’en fait les livres ont déjà été beaucoup lus au Moyen-Orient et au Maghreb, en anglais et en français. L’arabe, c’est l’une des langues les plus parlées dans le monde mais dans laquelle on traduit le moins de livres, toutes langues d’origine confondues. Il y a très peu d’éditeurs. Et puis je ne veux pas que ça soit publié chez un éditeur lié à une dictature ou à un régime autoritaire ! Donc c’est compliqué…

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On connaît votre série autobiographique sous le titre L’Arabe du futur. Mais la phrase complète, celle que vous dit votre père dans le premier tome, c’est « l’Arabe du futur va à l’école »
C’est vrai. Quand je ne voulais pas y aller et que je voulais rester jouer chez moi, mon père me disait : « Mais non, tu dois aller à l’école parce que l’Arabe du futur doit aller à l’école. » Ça s’opposait selon lui à l’Arabe du passé, ou l’Arabe actuel, qui était illettré et n’était jamais allé à l’école, comme les membres de sa famille. Lui, il était convaincu que l’émancipation passait par l’école, car c’est grâce à elle que lui-même avait échappé à sa condition.

Et vous pensez que c’est toujours le cas ?
Oui, même si on voit bien qu’avec l’affaiblissement du système scolaire en France, notamment par manque de moyens, l’émancipation paraît de moins en moins possible. Or l’école, c’est la base de la société ! C’est le lieu où on peut voir autre chose que ce qui se passe dans sa famille. Où entendre des choses nouvelles par rapport à chez soi. On prend beaucoup trop l’école pour un substitut de la famille, mais ce n’est pas aux profs de remplacer les parents. Ils sont là, je crois, pour transmettre à la fois un savoir et une ouverture sur le monde.

On prend beaucoup trop l’école pour un substitut de la famille

C’est important de le rappeler, à une époque où la religion s’invite de plus en plus dans les classes ? Et où on parle beaucoup du voile et de l’abaya au collège, par exemple ?
Vous savez, quand j’étais au lycée, je ne choisissais jamais le commentaire de texte, je prenais toujours la dissertation. Et aujourd’hui encore je suis très mauvais pour commenter les choses. Si dans mes livres je ne me suis jamais rien interdit, en revanche j’évite de faire des commentaires sur ces sujets parce que je ne suis pas très bon analyste… Je pense d’ailleurs que 99 % des gens qui donnent leur avis sur ces sujets sont aussi nuls et illégitimes que je le serais si je m’exprimais. Je préfère qu’on donne la parole à de vrais experts, sociologues, historiens, scientifiques ou anthropologues… Je suis profondément athée, je crois au progrès ! Je trouve ça très triste quand des jeunes choisissent de croire en l’irrationnel.

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Vous avez été scolarisé en Syrie, puis en France. Entre ces deux systèmes éducatifs, c’était le jour et la nuit ?
Le système syrien était très violent avec les élèves – on nous tapait en primaire – mais, mine de rien, il fonctionnait. Il était très inspiré du système soviétique, avec une discipline presque militaire. Si tu n’arrivais pas à apprendre un truc, tu te prenais des beignes jusqu’à ce que ça rentre. Il y avait quelque chose de très rude, très loin de la pédagogie ­Montessori ! Mais même si c’était très violent, ça donnait des bons ingénieurs, des bons médecins… Sauf qu’il n’y avait aucun esprit critique. On apprenait à lire le Coran – pas à le comprendre.

Le système syrien était très violent avec les élèves

Et en France ?
Par contraste, c’était stupéfiant de différence. Les élèves étaient considérés comme des êtres sacrés et précieux ! On tenait compte de leur ressenti ! On ne parlait jamais de Dieu ou de religion. Les élèves n’étaient pas frappés… Mon père était croyant et ma mère croyait aux esprits. J’ai grandi avec la certitude qu’il y avait des forces du mal, des revenants qui pouvaient nous hanter, des choses comme ça. C’est à l’école que j’ai entendu des profs dire que les fantômes n’existaient pas. Avec l’école, j’ai entraperçu un autre monde ou, plutôt, j’ai commencé à entrapercevoir le véritable monde. C’est pour ça que j’adore l’école et les profs.

Qu’est-ce que ça vous fait de savoir que vos livres sont étudiés au collège ?
C’est une grande fierté. Au lycée, j’avais une prof de français qui présentait les œuvres qu’on étudiait comme des monuments impossibles à atteindre, c’était assez castrateur ! On était tous écrasés devant la complexité que semblait ­représenter l’écriture. Bien sûr, écrire, ça peut être très complexe, mais ça peut aussi être un jeu, on peut se lancer et voir ce qu’il en ressort. Alors je suis heureux si mes livres peuvent faire passer l’idée qu’on peut s’amuser à écrire et y prendre du plaisir. Ce qui me plaît aussi, c’est que L’Arabe du futur est étudié en troisième dans le thème de l’autodérision, de ce que c’est que rire de soi. Or c’est quelque chose qui est en totale perte de vitesse aujourd’hui, parce que tout le monde se renferme de plus en plus dans son petit univers, dans son petit truc.

Ce qui me plaît, c’est que L’Arabe du futur est étudié dans le thème de l’autodérision

Rire de soi, dans L’Arabe du futur, ça passe beaucoup par rire de la religion. C’est encore possible selon vous aujourd’hui ?
Je n’ai pas l’impression de rire de la religion, mais de la pratique de la religion, ce qui est différent. Quelle qu’elle soit, d’ailleurs. Car ce qui m’intéresse, c’est la façon dont les gens mettent en application quelque chose qui pour moi est de l’ordre de la superstition ou du paranormal.

Mais peut-on se moquer de la pratique d’une religion sans être immédiatement taxé de « -phobie », quel que soit le mot que l’on place avant ?
Je ne vois pas l’écriture comme ça : je ne m’installe pas à ma table de travail en me disant : « Tiens, aujourd’hui, je vais me moquer de la pratique de la religion. » Dans L’Arabe du futur, je raconte simplement ce que j’ai personnellement vu. Je raconte aussi bien un voyage à Lourdes avec ma mère que la façon dont mes cousins syriens pratiquaient leur religion, ou comment des gens haut placés utilisaient la religion à leur profit. Parce que mine de rien, tous les humains sont pareils : ils ont tous les mêmes désirs, ils ont tous un inconscient et des rêves. À l’adolescence, tout le monde passe par cette période bizarre de la transformation du corps et chacun est obsédé par l’idée d’avoir des rapports sexuels. Et tout ça quelles que soient la culture ou l’origine ! Ce que fait ensuite la culture d’une société, c’est essayer de juguler ces pulsions.

Je n’ai pas l’impression de rire de la religion

Vous-même, vous n’êtes pas croyant ?
Non, pas du tout. Après, on ne peut pas s’empêcher de se poser des questions, surtout quand on avance en âge ! Le besoin de spiritualité, c’est un thème qui me plaît beaucoup. Car l’être humain a besoin de penser que son existence sert à quelque chose, d’expliquer sa présence. On peut tous constater un grand manque de spiritualité dans le monde. Elle a été remplacée par l’argent, par l’individualisme le plus forcené. Or l’être humain a besoin de spiritualité. Les gens cherchent donc à combler ce vide comme ils le peuvent. Et c’est pour cela que les identitarismes, notamment religieux, reviennent dans tous les sens. C’est une des façons de combler ce vide.

Hors religion, avez-vous des « dieux » ?
Oh oui, plusieurs ! Hergé ou Mœbius pour la BD, par exemple. Mais aussi Saint-­Exupéry. Il était militaire, pilote, et il s’est senti autorisé à un moment à être écrivain. À l’époque, la littérature était un univers cloisonné. Un militaire n’avait pas à écrire ! Mais il s’est dit que s’il ne racontait pas lui-même sa vie, personne ne le ferait à sa place. Je trouve ça émouvant de se dire qu’on peut sortir de son milieu et produire des œuvres touchantes, qui parlent du désarroi face à la vie, l’existence, la recherche d’un sens…

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On peut dire la même chose de vous, non ?

Moi, je suis de deux origines différentes. J’avais un grand-père breton qui était naturiste et un père quasiment islamiste. Deux antagonismes pratiquement impossibles à concilier ! [Rires.] Et donc je me suis choisi une autre identité, celle des auteurs.

Vous dites que votre père était « quasi islamiste ». Pourquoi quasi ?
Parce que dans l’imagerie actuelle, si on dit que quelqu’un est devenu islamiste ou intégriste, on va s’imaginer un salafiste, un type en djellaba et à la longue barbe. Or mon père n’est pas devenu salafiste avec l’âge, mais il est devenu très croyant, très rigoureux, tout en étant éduqué. C’est la même chose qui se passe dans l’esprit de certaines petites mamies qui, à 70 ans, se mettent à retourner à l’église, à lire la Bible : à un moment, la vie finissant, on cherche à arranger tout ce qu’on a pu faire de mal ou de travers au cas où il y aurait un truc après. Et donc ces personnes se mettent à condamner leurs actions passées, à rejeter des comportements qu’elles jugent tout à coup plus acceptables, à exiger ça aussi des gens qui sont autour d’eux et à montrer de plus en plus de rigueur morale.

L’être humain a besoin de penser que son existence sert à quelque chose

Autre trait de la personnalité de votre père : il était obsédé par l’argent…
En réalité, je suis issu d’une famille où tout le monde était obsédé par l’argent. Celui qu’on n’avait pas. On était une famille assez pauvre, pas dans la misère, mais de gens qui devaient faire attention, et parfois se priver…

Votre père avait quand même, racontez-vous, un compte à Jersey où étaient versés ses salaires quand il enseignait à Tripoli ou en Arabie saoudite…
Oui, sauf que quand il s’est barré, il a tout emporté ! [Rires.] Il avait 300 000 francs de l’époque sur ce compte. C’était beaucoup, mais on n’en a jamais vu la couleur. J’ai grandi avec cette figure du père qui était obsédé par l’idée de devenir milliardaire, et celle de la mère qui avait toujours besoin d’allocations pour nous aider. Et c’est vrai qu’on a été extrêmement aidés par la France. Il y a un système social extraordinaire, quasiment unique au monde, auquel je dois tout. C’est mon grand-père qui payait pour mon école d’arts appliqués à Nantes, à sa mort j’ai heureusement pu bénéficier d’une bourse de l’État pour continuer ma scolarité à l’école des Gobelins.

J’ai grandi avec cette figure du père qui était obsédé par l’idée de devenir milliardaire

Vous êtes l’un des plus gros vendeurs de livres aujourd’hui – et l’un des auteurs français les plus traduits. Vous ne devez donc plus avoir de problèmes d’argent ?
C’est vrai, j’ai cette chance. Je sais que j’appartiens au 0,07 % de la population le plus riche quand je regarde où je me situe sur le site de l’Insee… Mais aujourd’hui encore, quand je vais au restaurant, s’il y a par exemple un plat avec « supplément girolles, 12 euros », je ne vais pas faire comme si la question ne se posait pas. Je vais me demander si je le prends ou pas et si, hormis le fait que j’en ai envie ou pas, c’est pas trop cher pour des girolles, ou s’il va y en avoir beaucoup pour ce prix ou pas… En revanche, si votre question c’est est-ce que je collectionne les voitures de sport… Non, absolument pas. [Rires.]

Avant de connaître cet énorme succès avec L’Arabe du futur, mais aussi avec Les Cahiers d’Esther, vous aviez un style beaucoup moins… consensuel. Vos lecteurs d’aujourd’hui sont-ils parfois étonnés quand ils découvrent vos BD d’hier ?
C’est vrai qu’au départ, comme je voulais me faire remarquer, j’ai fait des BD très trash, avec du contenu sexuel, des blagues au quinzième degré. J’étais très fan de Robert Crumb, des Sales Blagues de Vuillemin dans L’Écho des Savanes. Je n’en revenais pas qu’on se permette de faire des blagues pareilles ! Je vénérais la liberté d’expression absolue qui était possible en France. Mais quand j’ai fait L’Arabe du futur et Les Cahiers d’Esther, je les ai pensés comme des BD qui auraient pu être lues par ma mamie bretonne. Parce que jamais elle n’aurait capté l’humour de Pascal Brutal, l’une de mes précédentes séries, par exemple. Mais c’est vrai que ça provoque parfois quelques moments drôles, comme cette mamie qui est venue un jour me voir en dédicace en me disant d’une petite voix chevrotante : « J’ai lu tout L’Arabe du futur, tous Les Cahiers d’Esther, et j’aime tellement que je suis allée voir vos autres BD. Mais Pascal ­Brutal, ce n’est pas du tout la même chose, j’ai été très choquée… »

Je les ai pensés comme des BD qui auraient pu être lues par ma mamie bretonne

Dans Pascal Brutal, il y a plus de dix ans, vous imaginiez une Russie revenue au temps des barbares ; vous vous proclamiez président d’un pays où la paix était assurée grâce à l’indépendance énergétique ; et vous aviez fait de la ­Belgique une gynarchie. Plutôt visionnaire pour quelqu’un qui dit ne pas être un bon analyste de l’actualité !
Quand je faisais Pascal Brutal, j’essayais de projeter dans l’avenir ce que je voyais en germe dans le monde. Par exemple, il n’y a rien d’aberrant dans le comportement actuel de Vladimir Poutine, je trouve. Il dit ce qu’il va faire depuis vingt ans, mais on a choisi de ne pas le voir, de mettre tout ça sous le tapis. Moi, ça fait longtemps que je ne comprends pas pourquoi on a été si tolérant face à la propagande russe en autorisant des chaînes de désinformation chez nous.

L’Arabe du futur sera sans doute un cadeau très offert pour les fêtes… Quels sont vos meilleurs souvenirs de Noël ?
J’ai cru jusque très tard au père Noël ! Je vénère ce mythe car c’est par son truchement (ou plutôt grâce à la vérité sur lui) que j’ai vraiment compris avec certitude que Dieu n’existait pas ! Mais je fais partie des gens qui installent leur sapin très tôt et l’enlèvent le plus tard possible…

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Chaque fois que vous croisez quelqu’un, il vous demande un dessin… Vous n’en avez pas marre, parfois ?
Jamais. [Rires.] J’ai passé des jours entiers seul à ma table de dédicace dans des festivals de BD ou des librairies à attendre que quelqu’un vienne me voir. Alors aujourd’hui c’est inenvisageable pour moi de refuser une dédicace. Les plus beaux moments de ma vie, c’est ça : des gens qui défilent et qui me disent qu’ils m’adorent ! Je ne serai jamais blasé. Certains rêvent toute leur vie d’écrire des livres ; moi, non seulement j’en fais, mais il y a des gens qui les lisent. La plupart des écrivains dont on parle dans les journaux ont souvent peu de lecteurs en réalité. Moi, j’ai des petites mamies qui viennent me voir en me disant que la première BD qu’elles avaient lue de leur vie c’était Bécassine, et que la deuxième, c’est L’Arabe du futur. On ne peut pas être blasé de ça : c’est bien plus que tout ce dont j’avais rêvé. 

Riad Sattouf au JDD : « Ce sont mes histoires qui décident d’être racontées »