Frère Baudouin, issu de la communauté Saint-Jean, a accompagné six personnalités pendant une semaine de retraite, dans un couvent corse, sous l’œil des caméras. Il raconte cette expérience insolite, qu’il assume pleinement.
Réunir un curé, une bonne sœur et six “personnalités” de la télé dans un couvent pour effectuer ensemble une retraite d’une semaine, silencieuse et déconnectée. Le pitch peut faire peur ou sourire. Pourtant, l’émission “Bienvenue au monastère” rassemble chaque soir quelque 500.000 téléspectateurs depuis le début de sa diffusion sur C8.
Au casting de cette téléréalité “bienveillante”, selon ses termes, figure le père Baudouin, un frère de Saint-Jean, également curé de la paroisse Saint-Laurent, à Orléans. “J’ai été contacté par deux jeunes paroissiens d’ici qui étaient en stage à Paris et devaient trouver un lieu et un prêtre pour filmer une retraite spirituelle avec les codes de la téléréalité. Je leur ai dit que j’étais chaud et leur ai proposé Corbara, en Corse.”
Un monastère somptueux, en pleine nature, qu’il connaît sur le bout des doigts.
“J’y ai passé mes jeunes années, j’ai été formé là-bas et j’y retourne tous les étés”, précise ce “bon client”, avenant et à l’aise dans l’exercice, accessible et drôle.
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Six personnalités vivent leur première retraite
Le voilà donc filmé au sein de sa communauté (7 ou 8 frères vivent sur place toute l’année), épaulé par sœur Catherine, de la communauté des Béatitudes.
Tous deux ont pour mission d’accompagner et de guider les candidats dans cette expérience inédite pour eux. Les six volontaires sont :
- Fabienne Carat, comédienne dans Plus belle la vie,
- Clara Morgane, l’ex-star du X,
- Delphine Wespiser, Miss France 2012,
- Simon Castaldi, le fils de Benjamin Castaldi et candidat de la téléréalité,
- Paul El Kharrat, candidat de jeu télévisé (il a remporté 153 fois l’émission Les Douze Coups de midi) et désormais chroniqueur radio,
- Jean-Marc-Généreux, danseur et chorégraphe franco-canadien.
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“Lors du premier dîner, ils ont pu parler pour faire connaissance. Mais après, ils ont passé 7 jours en silence et sans téléphone portable”, explique le curé, habitué de ces règles strictes qui font l’intérêt de ces retraites spirituelles.
“S’offrir le luxe du silence”
Pourquoi avoir accepté de participer à une telle émission, un brin racoleuse, sur le papier ?
“Le but, c’était de montrer qu’on peut tous avoir accès à notre vie intérieure. Le but était spirituel. Je n’étais pas là pour évangéliser. Une retraite, c’est se retirer du monde. Là, on offrait un lieu et un accompagnement pour vivre ça. Les gens ont soif de ça, mais ils croient qu’il faut toujours aller plus vite.”
Lui-même reconnaît être accro à son smartphone, “comme tout le monde. Souvent, je le mets en mode avion et je pars marcher en bords de Loire. On peut s’offrir ce luxe du silence”.
Chacun loge dans une chambre spartiate et vit au rythme des frères. À commencer par l’oraison, la prière en silence qui démarre à 7 heures. Recueillement sincère, petit somme, parfois quelques ricanements… L’exercice n’est pas aisé pour tout le monde. Chaque candidat dispose d’une caméra dans sa chambre, qu’il peut allumer et face à laquelle il peut se confier quand il le souhaite.
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“Il n’y avait pas d’oreillette, c’était la vraie vie”
Chaque jour aussi, le duo de religieux prévoit des activités spirituelles : une messe en pleine nature, de la plongée (une passion du frère Baudouin) pour aller prier sous l’eau, la réalisation d’une fresque, une lettre écrite à Dieu et des temps en tête-à-tête avec le frère ou la sœur, sans l’équipe de tournage, dans la “salle de dialogue”.
Des moments où plusieurs candidats craquent, pleurent et confient des choses assez personnelles.
“Il n’y avait pas d’oreillette, c’était la vraie vie. Ils ont vécu les différentes étapes d’une retraite et parlé d’eux, en allant tout de suite sur le registre de l’intime. Ils étaient dans une vérité qui nous a bouleversés.”
Comme lorsque Jean-Marc-Généreux évoque sa fille lourdement handicapée.
Chaque jour, les candidats défilent dans la “salle de dialogue” où ils se retrouvent en tête-à-tête avec le frère ou la sœur. Ici, frère Baudouin échange avec Paul.
Ce projet d’émission a mis des mois et même des années à se concrétiser. Le tournage s’est déroulé en mars dernier, en Corse. Les diocèses du Loiret et de Corse ont juste été informés et ce programme n’est sûrement pas du goût de tous les religieux et paroissiens. “C’était plein de joie !” se souvient frère Baudouin, qui assume à 100% et aime visiblement bousculer son Église et “mettre les pieds dans le plat”. “Je retire de cette expérience que ça m’a encouragé dans ma vie de frère et de prêtre, dans une vie qui peut faire du bien. Je puise ma joie en Dieu ! Les critiques me glissent dessus, car je vois le fruit de ce que je fais. Pour eux, il y aura sans doute un avant et un après.”
Abus et agressions. L’émission a suscité des critiques : les deux communautés religieuses de Saint-Jean et des Béatitudes ont été accusées de violences sexuelles et dérives sectaires. Un rapport de 800 pages, sorti en juin dernier à la demande de la communauté elle-même, a identifié 72 frères de Saint-Jean ayant commis des abus sexuels sur 167 victimes. Deux prêtres des Béatitudes ont, par ailleurs, été pointés du doigt par une enquête de La Croix Hebdo pour des agressions sexuelles. Leurs fondateurs avaient déjà été accusés d’abus spirituels et d’agressions sexuelles au début des années 2000.
“Bienvenue au monastère” : est diffusé le vendredi à 21 h 15 sur C8. Replay disponible. Frère Baudouin a tiré un livre de cette émission, Vivement la retraite… spirituelle (éd. Première partie, 11,90 euros), où il guide tous ceux qui voudront tenter cette expérience de vivre une retraite.
Marie Guibal