XVIIe sicle

L’appellation « Grand Siècle » attribuée au XVIIe siècle français désigne un sommet de civilisation, passé à la postérité sous le signe de la grandeur et de la raison, mais qui fut aussi parcouru de passions – mystiques, littéraires, amoureuses, politiques – dont le point commun est la hauteur d’engagement. « Grand siècle des âmes » (Daniel-Rops), le XVIIe siècle français n’est certes pas univoque.

Qu’il s’agisse de foi, de culture ou de gouvernement, on ne s’engage pas de la même manière sous Henri IV, Louis XIII ou au début de la régence d’Anne d’Autriche que sous le règne de Louis XIV. Les mentalités du premier XVIIe siècle sont marquées par une tension vers l’héroïsme, le goût du romanesque et la conquête de l’idéal.

Sous le long règne de Louis XIV, traversé de passions tragiques et de déchirures de l’esprit public, de la Fronde aux querelles religieuses de la fin du siècle sur fond de montée du libertinage, le pessimisme augustinien domine. Mais l’art de vivre en société est commun aux deux périodes.

Philippe de Champaigne, portraits de Louis-Isaac Lemaistre de Sacy, traducteur de la Bible, dite aussi Bible de Port-Royal, et d'Antoine Singlin, membre de la communauté janséniste de Port-Royal des Champs et directeur spirituel de Blaise Pascal. Dans les cercles de la noblesse et de la haute magistrature, la « conversation des honnêtes gens », faite d’amour des mots, de courtoisie réciproque et d’intérêt très vif pour les saillies de l’esprit, devient un grand jeu littéraire où se polit la civilisation française. Le revers de la médaille est la tentation, à laquelle cèderont les Solitaires de Port-Royal, de « rompre en visière » avec un monde en représentation permanente pour mieux viser l’absolu.

Evoquer les femmes du Grand Siècle, c’est prendre conscience qu’au premier comme au second XVIIe siècle les élites féminines ont joué un rôle déterminant dans cette affirmation et cette évolution de la vie spirituelle, intellectuelle, sociale et politique de leur temps.

Inspiratrices ou actrices, médiatrices d’idées et de comportements, certaines d’entre elles furent des éducatrices de la société, d’autres des pionnières de l’indépendance féminine. Toutes ont témoigné d’une grande liberté d’esprit et d’allures et d’un attachement sans faille à ce qui leur semblait essentiel. Ce faisant, elles ont fécondé leur temps.

À les voir vivre, on mesure l’écart qu’il peut y avoir entre les normes rigides d’une société « d’ordres », comme l’était le XVIIe siècle, et la réalité humaine quotidienne qui permettait de s’en échapper en souplesse, au prix d’un peu de constance et de volonté. Car il y a un paradoxe dans le destin des grandes figures féminines de l’époque. À considérer leur statut juridique, elles sont fort peu libres, passant de la tutelle de leur père à celle de leur mari, voire des autorités de leur couvent.

Madame de la Peltrie, Anonyme, XVIIe siècle, monastère des Ursulines de Québec. Agrandissement : Détails d’une peinture de sœur Sainte-Marie : Arrivée des Hospitalières à Québec, Collections du Monastère des Augustines à Québec.Comme au siècle précédent, elles sont exclues des charges publiques, et la puissance de leur époux, à la fois de droit divin par le sacrement de mariage et de droit naturel selon les règles de l’État, fonde les décisions de leur vie quotidienne.

Seules les veuves jouissent d’une autonomie juridique, ne dépendant plus que d’elles-mêmes et pouvant gérer leurs biens comme bon leur semble. Encore faut-il qu’elles réussissent à échapper aux pressions des parents pour un remariage : une Madeleine de La Peltrie, pionnière des missionnaires de la Nouvelle-France, ne put partir pour le Québec, en 1639, qu’au prix d’un stratagème rocambolesque pour échapper à sa famille.

En revanche Mme de Sévigné, veuve à 25 ans, sut imposer au conseil de famille sa volonté de ne pas se remarier, mais d’élever ses deux enfants et de gérer ses biens comme elle l’entendait.

Notons que ce sont d’abord des veuves, issues de la haute magistrature et de la noblesse, qui constituent à partir de 1634 la puissante confrérie des Dames de la charité de l’Hôtel-Dieu de Paris, gérant en toute autonomie les finances et l’administration des œuvres de saint Vincent de Paul, depuis les secours sur le front des guerres jusqu’aux missions lointaines, en passant par l‘œuvre des Enfants trouvés.

Mais il n’y a pas parmi ces femmes que des veuves, ce qui nous conduit à préciser que d’autres éléments entrent en ligne de compte pour une juste appréciation du statut de la femme au XVIIe siècle. Distinguons-en deux. D’abord, la prééminence des hiérarchies sociales.

XVIIe sicle – Le Grand Sicle des Femmes