Marie de Hennezel : « Une vieillesse heureuse et féconde est possible »

La conférence « Peut-on décider de bien vieillir ? » se tiendra le 29 septembre à 19h dans l’auditorium du Monde, en présence de Marie de Hennezel, psychologue et psychothérapeute.Pour vous y inscrire, rendez-vous ici

Derrière la figure médiatique joliment sophistiquée, c’est un parcours tout-terrain que l’on découvre en l’écoutant. Psychologue clinicienne et psychanalyste, Marie de Hennezel s’inscrit dans le sillage, marginal en France, de Jung, le dissident de Freud. Formée à l’haptonomie, elle a exercé auprès des mourants cette pratique habituellement associée à la naissance, qui met en œuvre le toucher et balaie la sacro-sainte distance thérapeutique.

Première psychologue de la première unité française de soins palliatifs, elle a partagé son expérience dans de nombreux livres. Ses combats pour le respect de la vie jusqu’au dernier souffle et son accompagnement de François Mitterrand au soir de la sienne ont contribué à la rendre célèbre. Depuis plusieurs années, c’est au tabou de la vieillesse qu’elle ose s’attaquer. Afin de révéler les belles surprises que réserve cette étape de la vie.

La Vie. Votre nom est associé à la fin de vie. N’est-ce pas lourd à porter dans une société où maladie, vieillesse et mort passent pour des gros mots ?

Marie de Hennezel. Quand, en 1995, j’ai voulu faire paraître la Mort intime, mon éditeur m’a dit : « Avec un tel titre, votre livre ne se vendra pas, la société a trop peur de la mort ! » Après avoir réfléchi, je lui ai répondu que, s’il refusait, je retirerais mon manuscrit. Je voulais le mot « mort » dans le titre ; je l’assumais. À la sortie du livre, Libération a titré « L’ange de la mort » au-dessus de ma photo, et cela a pu effectivement paraître difficile à porter. Mais pas pour moi, car j’avais depuis longtemps l’impression d’avoir un rôle à jouer dans la société. Je l’avais senti très tôt, grâce à un rêve que j’ai d’ailleurs raconté dans ce livre.

Que disait votre rêve ?

Je commençais à exercer en soins palliatifs quand une nuit, en rêve, je me vois dans une cuisine avec un homme. Celui-ci me demande de regarder dans le conduit d’une cheminée. Au milieu de la suie, je distingue qu’un liquide s’écoule. Je le touche, le goûte et découvre du miel. J’annonce alors à cet homme : « Il faut que j’aille dire à tout le monde qu’il y a du miel dans la cheminée. » Au réveil, en bonne psychanalyste jungienne familière de l’interprétation des rêves que je suis, j’ai associé ce rêve à ce que je vivais à l’hôpital.

Car, là, le travail touchait à ce que notre époque considère effectivement comme des repoussoirs : la maladie et la mort. Et de même que l’on cache la suie dans le conduit des cheminées, cette société cache la mort. Mon rêve parle d’une découverte : il y a du miel, donc quelque chose de doux, de bon, qui coule dans un conduit sale et dégoûtant. Dans le rêve, je prends conscience que cette découverte, je dois la faire connaître. J’ai alors compris ce qu’il me restait à faire.

Pouvez-vous nous éclairer ?

À mon arrivée dans le service, j’ai découvert qu’il se vit, dans l’accompagnement des mourants, des moments extrêmement précieux, humainement parlant, puisqu’il s’agit des derniers échanges avec un être qui va mourir. Peu importe que son corps soit délabré, que la mort soit perçue comme dégoûtante. Voilà une personne qui vit ses derniers instants ; c’est pourquoi les croisements de regards, les mots échangés peuvent être empreints d’une tendresse telle qu’il ne faut surtout pas passer à côté de ces moments.

Quant à mon rêve, par une métaphore, il me montrait ma mission : faire savoir que ces moments doux et précieux comme le miel méritent que l’on dépasse la répugnance suscitée par l’approche de la mort. Dès lors, je n’ai plus cessé de le dire et de l’écrire. Et j’assume sereinement d’être considérée comme « l’ange de la mort ».

Étrange destin pour une ancienne professeure d’anglais…

Effectivement, l’enseignement est mon premier métier. Et puis j’ai entamé une psychanalyse, au moment de la naissance de mon deuxième enfant. J’étais alors en recherche, pas très bien dans ma peau. La psychanalyse était à la mode, et la lecture de Françoise Dolto, qui était freudienne, m’a décidée à tenter l’aventure. Tout le monde allait alors vers le lacanisme.

Or, j’avais l’impression que mes amis qui empruntaient cette voie se retrouvaient sous le joug d’une théorie. C’est pourquoi l’appel à la liberté de Jung, qui écrit, dans Ma vie, « Je ne cherche pas à avoir des disciples qui me suivent, mais à ce que les gens se sentent libres », m’a convaincue. Je n’ai jamais regretté d’avoir choisi la voie jungienne. Parallèlement à l’analyse, je me suis aussi inscrite à la fac où j’ai obtenu un DESS (l’équivalent actuel d’un master, ndlr) de psychologie clinique, ce qui m’a permis d’exercer à l’hôpital. Sans ce diplôme, cela n’aurait pas été possible.

C’est donc en tant que psychologue que vous avez exercé en milieu hospitalier et non comme psychanalyste ?

La psychanalyse ne fait pas partie des disciplines universitaires et, en tant que telle, n’a pas de place dans les hôpitaux. Est psychanalyste celui qui a suivi lui-même une psychanalyse, c’est la seule règle. Quant au psychologue, avant d’exercer, il étudie l’anatomie du cerveau, la chimie du corps et autres matières qui n’ont pas grand-chose à voir avec le travail analytique sur soi-même.

Sans expérience de la cure, le psychologue ne risque-t-il pas d’être un sachant pour l’autre, « un assassin de l’âme », pour reprendre la critique faite par Jung à la philosophie ?

C’est un risque. Et, même si ce n’est pas exigé, je crois primordial d’avoir sondé ce qui se passe dans son propre inconscient, afin de ne pas projeter sur l’autre les questions que l’on n’a pas réglées en soi-même. Car le « sachant » peut tomber à côté, être dans le jugement. Jung conseille au thérapeute d’être non seulement à l’écoute de son patient, mais aussi de l’inviter à dialoguer avec ses propres rêves. Car nos rêves nous apportent des messages envoyés par notre inconscient. L’analyste est là pour écouter le rêve et aider le patient à comprendre ce dont parle ce rêve. Ce recours au rêve m’a semblé le meilleur moyen de s’approcher au plus près de la vérité de l’autre.

Qu’avez-vous appris par le dialogue avec vos rêves ?

Je n’ai jamais cessé ce dialogue ; il m’aide à mieux me connaître et à compenser l’impact affectif des aléas de l’existence. Ils m’éclairent aussi sur la coexistence des contraires, idée chère à Jung pour qui, à trop vouloir cultiver nos qualités, nous en oublions leur part d’ombre. Ignorer cette polarité en nous revient à vivre seulement au niveau conscient.

La conscience est orientée par l’éducation, les valeurs familiales et culturelles. Elle ignore ce qui se vit dans les « profondeurs » – Jung désigne ainsi le lieu des ombres, c’est-à-dire de ce que l’on a rejeté, par nous-même ou par mimétisme culturel, mais qui n’en demeure pas moins en nous. Pour ne pas se laisser piéger par ses ombres, encore faut-il aller visiter ses profondeurs, par un travail analytique et grâce au dialogue avec nos rêves. Par ailleurs, pour Jung, nos rêves nous éclairent sur notre devenir. Il existe en effet des rêves prospectifs, qui annoncent le chemin que l’on va prendre.

Une sorte de « Deviens ce que tu es »

Absolument. Ainsi, le rêve que j’ai cité m’a non seulement montré un autre aspect de ma vie – le monde de la mort réputé effrayant, dégoûtant, dans lequel je travaillais, est précieux –, mais aussi que j’avais l’intention de le faire savoir. Après ce rêve, je me suis attelée à l’écriture de la Mort intime. Grâce à Jung, j’ai appris que nos rêves sont une source de savoir, de sagesse et qu’ils nous ouvrent vers l’avenir.

Entre Freud et Lacan, Jung offre donc véritablement une troisième voie ?

Tout à fait, car Freud s’est contenté de voir dans l’inconscient le réservoir du refoulé, tandis que Jung est allé beaucoup plus loin dans l’analyse, en identifiant un niveau d’inconscient familial, où niche en soi la mémoire de sa famille, et un niveau d’inconscient collectif. Il a ainsi montré que nous avons en nous la mémoire d’une culture ; la mémoire du monde est donc là, en nous. Et puis cette prospective à travers des rêves, qui ne parlent pas seulement du présent et du passé, mais aussi de l’avenir, est pour moi très féconde.

Aujourd’hui encore, Jung est méconnu en France. Mais, à l’époque où vous avez décidé de le suivre, le lacanisme ne régnait-il pas en maître ?

Si, bien sûr, et j’avais l’impression d’être une ringarde. À Paris-VII, où j’étudiais, la plupart de mes professeurs ne connaissaient pas Jung ; quelques heures d’enseignement lui étaient tout juste consacrées. Pour le reste, c’était l’ère du lacanisme.

Mais à travers ce que j’en percevais chez mes amis, tout ce travail autour des mots et des jeux de mots me semblait très mental. Tandis que la confrontation avec sa propre profondeur proposée par Jung, à travers le dialogue avec ses rêves, sonnait juste pour moi. Au cours de ma vie, j’ai souvent fait des choix qui m’ont conduite dans des directions sans que je sache exactement pourquoi, mais je fais confiance à mon intuition.

Comment la définiriez-vous ?

Jung distingue une fonction de pensée-­sentiment, qui est rationnelle, et une autre, d’intuition-­sensation, qui est plus irrationnelle. J’ai davantage conduit ma vie sur le second axe plutôt que sur le premier. Et je m’en trouve plutôt heureuse. Mais cela ne m’a pas empêchée de vouloir aussi faire des études universitaires, car je ne voulais pas seulement être dans l’expérience et j’ai un infini respect pour le savoir et la science.

Vous avez donc choisi la carrière hospitalière…

J’ai commencé à exercer dans un bureau d’aide sociale. Juste après la loi Veil, on cherchait alors des psychologues pour faire des entretiens préalables à l’IVG. J’ai ensuite intégré un service de psychiatrie lourde, à l’hôpital de Villejuif, où j’ai passé quelques années. Et puis, en 1984, alors que je cherchais à quitter la psychiatrie, j’ai fait la connaissance de François Mitterrand.

François Mitterrand était alors à l’Élysée depuis trois ans. Comment l’avez-vous rencontré ?

Lors de la remise de la Légion d’honneur d’un demi-frère, j’ai été présentée au Président. Il s’est alors passé quelque chose dans notre échange de regards. Ensuite, dans un rêve prospectif, je me suis vue avec lui. Nous devions plonger dans une canalisation où je devais le guider parce que, disait le rêve, je savais « respirer sous l’eau ».

Au réveil, j’ai compris que j’avais un rôle à jouer auprès du Président et qu’il s’agissait de l’accompagner dans une plongée dans les profondeurs… Car si l’eau est la vie, elle est aussi le symbole de l’inconscient. D’après le rêve, je savais respirer sous l’eau, or le souffle étant lié à la spiritualité, j’ai compris que mon rôle devait être de cet ordre. J’ai alors écrit au Président que je lui envoyais des ondes de paix et de prière, car j’avais été frappée, lors de notre rencontre, par sa solitude. Il m’a répondu, se disant touché et demandant à faire ma connaissance. Nous nous sommes rencontrés dans la bibliothèque de l’Élysée. Ensuite, pendant 12 ans, nous nous sommes retrouvés à intervalles plus ou moins réguliers.

S’agissait-il d’une relation thérapeutique ?

Clairement non. Le cadre de notre relation n’était pas thérapeutique. C’est le Président lui-même qui rythmait nos rencontres. Il m’invitait à déjeuner à l’Élysée ou bien il venait chez moi. Parfois, il me demandait de l’accompagner dans ses promenades dans les rues de Paris ou chez les bouquinistes. Et il n’y avait pas d’échange d’argent entre nous. Je lui avais raconté mon rêve, et nous savions que notre rencontre était d’un autre ordre. Je n’étais pas non plus sa maîtresse, ce point aussi avait été éclairci dès le départ.

Nos discussions portaient essentiellement sur la spiritualité et sur la mort. Car ce qui a noué notre relation, c’est quand il m’a dit, lors de notre deuxième rencontre : « À l’heure où nous parlons, je devrais être mort. » Nous étions en novembre 1984, et comme la plupart des Français j’ignorais tout de sa maladie. Surprise donc, j’ai simplement répondu : « Qui peut vous dire le temps qu’il vous reste à vivre ? Cela dépend de votre désir, de ce que vous avez encore à faire sur terre et des forces de l’esprit. » J’ai vu dans son regard qu’il attendait ces mots. D’ailleurs, il est mort en 1996, alors que, en 1981, les médecins lui avaient prédit trois ans d’espérance de vie.

Vous seriez donc l’inspiratrice de l’expression « les forces de l’esprit » ?

François Mitterrand reprendra effectivement ces mots, dans ses vœux aux Français, en 1994, avant de quitter l’Élysée, et ils eurent du retentissement. En les prononçant la première fois, j’ai vu que je touchais juste. Le Président a ensuite souvent répété : « Vous êtes une chercheuse spirituelle, j’aime votre liberté. » Et, de fait, élevée dans le catholicisme, j’ai été initiée, autour de la quarantaine, par le prêtre orthodoxe Jean-Yves Leloup, à la prière du cœur et je m’intéressais au bouddhisme ; je n’ai jamais été dogmatique. Nous échangions aussi des livres.

C’est grâce au Président que j’ai lu Une vie bouleversée, ce texte d’une profondeur mystique extraordinaire écrit par Etty Hillesum, une jeune juive d’Amsterdam se sachant promise à l’extermination. Quant à lui, il avait été intéressé par Meurtre dans la cathédrale, de T.S. Eliot, que je lui avais donné et qui montre les interrogations d’un évêque qui sait qu’il va être assassiné, donc qu’il va mourir. Après avoir créé mon poste de psychologue en soins palliatifs, il me demandait sans cesse de lui parler de mon travail au chevet des mourants.

C’est donc par François Mitterrand que vous en êtes arrivée aux soins palliatifs ?

Il a voulu une psychologue à demeure dans la première unité de soins palliatifs qui se créait en France, sous la direction du docteur Maurice Abiven, à l’hôpital international de la Cité universitaire, à Paris. Pour mesurer ce que cela a représenté, rappelons qu’à l’époque il régnait une sorte d’omerta en France : on faisait comme si les gens ne mouraient pas à l’hôpital. Or, ils y mouraient. Et on ne savait ni soulager leurs douleurs ni les accompagner. On les euthanasiait avec un cocktail lytique, qui accélérait leur fin.

Ce n’est qu’en 1984, au fameux congrès de Nice, que l’on s’est ému de cette pratique. D’autant qu’en Angleterre et au Québec on savait prendre en charge les mourants. En 1985, le ministre de la Santé en fonction, Edmond Hervé, créa une commission ministérielle sur l’accompagnement des mourants. Après une année de réflexion, la décision d’ouvrir des unités de soins palliatifs fut prise, et, dans ce sillage, des associations se créèrent. Cela répondait à une véritable prise de conscience du fait que l’on mourrait mal dans notre pays.

La fin du déni n’a-t-elle pas sonné avec l’apparition du sida, qui a conduit à l’hôpital de jeunes patients condamnés ?

Le sida a produit une révolution dans la relation des médecins avec leurs malades. Car, jusqu’à la découverte des trithérapies, en 1996, qui l’ont transformé en maladie chronique, il était mortel. Face à des patients dans la fleur de l’âge et parfaitement lucides, les soignants furent obligés d’entretenir une relation de vérité. La médecine hospitalière a pris conscience que, au-delà du curatif, elle devait chercher à améliorer le bien-être des patients et à soulager leurs douleurs. Dans cette première unité de soins palliatifs, il y avait une vraie compétence dans ce domaine. Une ouverture d’esprit, également, car nous avions réussi à faire venir un acupuncteur chinois dans le service, convaincus des effets positifs de cette pratique traditionnelle sur les douleurs.

Comment avez-vous accueilli la proposition d’intégrer un tel service ?

J’ai tout de suite senti que c’était une voie pour la soignante que je suis. Et puis il s’agissait d’une expérience pilote ; même si nous nous sommes inspirés de l’expérience du Québec, il y avait tout à inventer. Mon rôle consistait à accompagner les patients et les familles, mais aussi l’équipe soignante.

J’ai mis en place pour celle-ci une réunion de deuil hebdomadaire, au cours de laquelle nous parlions de tous ceux qui étaient décédés dans la semaine (il y en avait en moyenne une vingtaine par mois). C’était une façon pour les infirmières, les aides-soignantes et les médecins d’exprimer ce qu’ils avaient vécu pendant cet accompagnement, de parler une dernière fois de la personne suivie et de lui faire nos adieux, avant que la chambre ne soit occupée par un autre mourant.

Votre travail auprès des patients consistait-il à les aider à se résigner ?

Nous n’avions pas vraiment de projet si ce n’est de soulager la douleur physique, de permettre aux familles d’être là, d’accompagner et de faire en sorte que les mourants se sentent vivants jusqu’au bout. Pour cela, mon rôle consistait à me mettre à leur écoute et à leur offrir une présence. Physique. En cela, ma formation en haptonomie (lire encadré) m’a guidée. Je prenais contact tactilement avec les patients, ce qui pour un psy n’est pas une évidence.

L’objectif était de faire sentir à la personne mourante qu’elle n’était pas seule pour vivre ce moment ultime. Car toutes sentaient plus ou moins qu’elles allaient mourir, dans une société où la mort terrorise. D’ailleurs, les familles n’osaient pas forcément venir. Il faut donc imaginer la solitude de ceux qui mouraient. Par conséquent, sentir la proximité d’un être qui est là sans angoisse, c’est énorme pour quelqu’un qui meurt. Et, s’il en a besoin, il peut parler.

De quoi les mourants vous parlaient-ils ?

Ils disent ce qu’ils ont à dire. Et je n’ai fait que recueillir des paroles qui ont pu être dites parce que j’étais là, proche. C’est ce que j’ai essayé de transmettre aux infirmières et aux familles. Certains me disaient : « Mais, si je pleure… » Je leur répondais : « Soyez vous-même. Si vous avez envie de pleurer, pleurez. Il ou elle pleurera avec vous. Cela fait du bien de pleurer à deux. On pleure un moment, puis cela s’arrête. »

J’invitais donc les familles à être présentes et à parler avec le cœur. Il n’y a rien de particulier à dire ou à ne pas dire si ce n’est d’exprimer, si on le désire, ce que l’on ressent à ce moment-là. Il suffit alors de dire : « Si je ne te revois pas, j’aimerais que tu saches… » Ce qui est une manière sans violence de s’exprimer. La vraie clé, c’est d’être là, au plus proche de son cœur et de laisser faire. Et d’écouter. J’ai été tellement impressionnée par tout ce que les personnes mourantes m’ont raconté que je l’ai écrit dans la Mort intime.

Remplaciez-vous les familles auprès des patients ou faisiez-vous plutôt le pont entre ceux-ci et leurs proches ?

Les deux. Parfois, quand les familles étaient là, j’occupais une autre position, celle de l’étranger
à qui l’on fait des confidences que l’on ne ferait pas
à ses proches. Je pense à cette jeune femme de 35 ans qui me confie un jour sa tristesse de ne pas arriver à dire à son fils de 12 ans qu’elle ne l’abandonne pas en mourant. Je lui demande alors pourquoi elle ne le fait pas. « Trop d’émotion, je ne peux pas », me répond-elle. Je pense qu’elle est morte sans avoir parlé à son fils. En tout cas, lorsque, ensuite, j’ai rencontré celui-ci, je lui ai répété ce que m’avait dit sa mère. Il en a été très ému.

Vous écrivez que la maladie et l’arrivée de la mort proposent une métanoïa, un chemin de transformation. Certains individus refusent-ils cette proposition ?

J’ai rencontré des personnes enfermées dans le déni, pour se protéger elles-mêmes, car il y a une certaine force dans le déni. Pour protéger l’entourage aussi. C’est rare que cela tienne jusqu’au bout, mais cela arrive. On ne peut aller contre, car ceux qui réagissent ainsi ne peuvent sans doute pas faire autrement. Je n’ai jamais été favorable à l’usage de la violence contre quelqu’un qui ne peut pas entendre. Ni au mensonge. Entre les deux, il faut être attentif aux perches qui sont tendues. Par exemple, à quelqu’un qui me disait un jour : « Quand j’irai mieux, nous irons à Venise », j’ai demandé de me parler de Venise. Au lieu d’entretenir le déni, il faut essayer de rebondir sur le désir que ce genre de propos traduit, car c’est encore un vivant qui s’exprime ainsi.

Rester vivant jusqu’au bout semble votre credo. Ne vaudrait-il pas mieux aider à mourir ?

Tous les cas sont uniques. Certaines personnes s’éteignent doucement, désinvestissent la vie sereinement, comme dans un glissement progressif, en douceur. D’autres, qui continuent d’exprimer des désirs de vie, ont besoin de se sentir vivantes jusqu’au bout. Il faut alors entretenir cette vie, au moins dans l’instant, même si elle s’en va. On observe souvent, tout à la fin, un regain d’énergie psychique mis au service de ce que le psychologue Michel de M’Uzan appelle le « travail du trépas » : cette dernière tâche qui est « une tentative de se mettre complètement au monde avant de disparaître » (De l’art à la mort, Gallimard, 1977). Quelle magnifique image d’accouchement de soi-même !

Parleriez-vous d’un rattrapage de la vie ?

Plus qu’un rattrapage, j’y vois une manière d’honorer la vie. Je pense à ce malade du sida qui a voulu faire une grande fête avec ses amis. Non pas pour braver la mort, mais pour célébrer ses amis, la vie et l’amitié partagée. Nous favorisions ce genre d’initiative dans le service. Qui l’a vécu sait que ces moments sont irremplaçables. C’est ce qu’expriment les personnes dans leur deuil. Et c’est ce qui a été interdit à tant de personnes au cours du premier confinement, au début de la pandémie de Covid-19.

Cohabiter avec la mort pendant près de neuf ans ne vous a-t-il pas plongée dans la morbidité, voire la dépression ?

Au contraire. Cette expérience m’a donné un goût intense de la vie et de ses plaisirs, elle m’a rendue encore plus curieuse. J’ai reçu des leçons de sagesse des mourants, mais aussi de la part des soignants. C’est une des périodes les plus intenses de mon existence, j’y puise encore des forces. On me demande parfois si cela ne m’a pas blindée. En fait, je ne crois pas. Accompagner, c’est se rendre présent, accomplir les derniers gestes, accueillir le chagrin de celle ou de celui qui apprend la mort d’un proche, le prendre dans ses bras… J’étais toujours active, sans cesse, et même s’il fallait agir avec douceur, l’action permet de tenir le temps nécessaire, après quoi il faut replonger dans sa vie, c’est ce que je faisais en sortant de l’hôpital. Et tous ces moments m’ont indéniablement construite.

Et l’accompagnement des personnes endeuillées…

C’est une autre expérience. Je recevais dans mon bureau, à l’hôpital, des personnes endeuillées. Le deuil est un processus de long terme. Le thérapeute doit s’immerger dans le désespoir de l’autre. Ce qui le soutient, c’est la confiance qu’il a dans les ressources internes de cette patiente ou de ce patient qui, plongé(e) dans son chagrin, ne sent pas ses ressorts. Car c’est bien le rôle du thérapeute de porter cette confiance pour le patient qui, à mesure du travail thérapeutique, va lui-même découvrir ses ressources propres. Il existe aussi des groupes de parole, des associations pour accompagner le deuil. Car, pour l’entourage, ce n’est pas simple d’entendre un proche endeuillé, avec parfois le sentiment qu’il ressasse son chagrin.

Vous êtes devenue une des voix. de la vieillesse en France. Qu’est-ce qui vous a amenée sur ce terrain ?

Alors que j’arrivais moi-même à l’âge de 60 ans, j’ai été invitée à participer à une conférence intitulée : « Comment accepter de vieillir ? » Je n’avais jamais travaillé cette question. En l’explorant, j’ai découvert l’existence des centenaires de l’île ­d’­Okinawa, des vieillards heureux, considérés par leurs descendants comme des trésors. Près de 900 personnes de plus de 60 ans sont venues assister à la conférence. Cela m’a donné envie de creuser la question.

D’autant que j’appartiens à cette fameuse génération de baby-boomeurs qui, parmi les premières, accède à la vieillesse en bonne santé. C’est à nous de faire reconnaître cet état de fait par la société et de faire évoluer le regard de celle-ci. J’ai donc décidé d’écrire un livre intitulé La chaleur du cœur empêche nos corps de rouiller, un refrain chanté par les centenaires d’Okinawa. Je voulais que ce texte soit lumineux, mais, à force de lire des articles déprimants sur le sentiment d’isolement, l’abandon des vieux, la maltraitance… j’ai commencé à déprimer moi-même.

Jusqu’à douter de réussir à rédiger ce texte. Je suis partie alors à la rencontre de personnes de 90 ans qui me semblaient rayonnantes, Sœur Emmanuelle, Stéphane ­Hessel, mon éditeur Robert Laffont et d’autres moins célèbres. J’ai demandé à ces vieillards de m’expliquer ce qui les rendait heureux et lumineux. Le livre révèle leurs secrets ou plutôt leurs clés pour avancer sereinement en âge. Il a attiré l’attention de la caisse de retraite Audiens (des métiers de la presse et de l’audiovisuel, ndlr), qui m’a demandé d’animer des séminaires.

Vieillir peut-il vraiment s’enseigner ?

Le ministère de la Santé lançait alors un plan pour bien vieillir, sur la base de trois critères : bien s’alimenter, bouger, rester en lien. On m’a demandé d’apporter à cela la dimension psychologique et spirituelle, au sens large du terme. Depuis, cela fait 15 ans que j’anime des séminaires interactifs pour les nouveaux retraités sur l’art de bien vieillir et de rester désirant. C’est-à-dire d’être prêt à continuer d’avancer.

Puis les résidences services Domitys m’ont demandé de proposer à leurs résidents, qui sont plus âgés, autour de 80 à 100 ans, un parcours sur l’aventure de vieillir (lire page 38). L’objectif se décline en trois points. Primo, montrer que vieillir n’est pas seulement un parcours de perte et de diminution, mais aussi, et c’est un paradoxe, d’ouverture à la nouveauté. Secundo, qu’il y a une jeunesse du cœur et de l’esprit, tout ne vieillit pas. Tertio, qu’une vieillesse heureuse, féconde et intéressante est possible. J’ai construit un parcours que j’ai proposé dans 17 résidences, puis j’ai formé plusieurs groupes de psychologues qui, à présent, prennent le relais.

Qu’est-ce que ces séminaires vous ont appris ?

À travers les groupes de parole, j’ai découvert qu’échanger les expériences heureuses, fécondes et intéressantes au lieu des regrets et des plaintes permet de garder l’estime de soi. Cette estime se révèle fondamentale pour maintenir son autonomie. A contrario, la perte d’autonomie relève souvent plus d’un état d’esprit dégradé que d’un accident. Conserver ou bien retrouver le sentiment d’avoir encore des choses à transmettre, et aussi à découvrir, change la donne.

La posture physique est meilleure et donc l’équilibre, ce qui réduit les risques de tomber et favorise l’autonomie. Par ailleurs, beaucoup des participants disent : « Jamais personne ne s’intéresse à ce que nous vivons. » À l’issue des séminaires, ils créent souvent des petites communautés pour continuer à partager et à se soutenir. Les nouvelles formes d’habitat pour les seniors, par exemple les logements de Béguinage solidaire (lire page 43), qui peuvent s’ancrer sur l’idée que l’on peut faire communauté autour de ce que l’on vit de spécifique à mesure que l’on prend de l’âge, vont dans le même sens.

Quelles sont les spécificités de cette étape de la vie ?

Lors d’une réunion du Collectif national autoproclamé de la vieillesse (CNav) à la ­Cartoucherie de Vincennes, Ariane Mnouchkine, la fondatrice du Théâtre du soleil, a dénoncé le manque d’imagination qui consiste à ne voir dans la vieillesse qu’une dégringolade. Une femme de 90 ans a alors ajouté : « Vieillir est une inconnue. Tout se délite, et en même temps s’ouvre un espace de grâce. »

Elle a parfaitement exprimé ce paradoxe : le corps décline, mais la pensée continue à croître, et on peut s’ouvrir au nouveau. Il peut y avoir une éclosion. L’ouverture ne passe plus par l’extérieur, elle se produit à l’intérieur des êtres. Quelqu’un m’a dit un jour : « Quand je regarde un arbre, je l’apprécie, je le savoure autrement qu’il y a 10 ou 20 ans. » La sensualité ne vieillit pas avec l’âge, au contraire. La capacité de présence augmente. De même que la capacité à se laisser surprendre et à ne pas passer à côté de certaines choses que l’on n’avait pas vues jusque-là. Un autre regard sur les autres s’installe également. Voilà pourquoi, depuis quinze ans, je m’emploie à faire entendre que l’avancée en âge n’est pas une catastrophe, elle réserve de bonnes surprises.

Même si l’espérance de vie en bonne santé s’allonge, l’âge passe pour un défaut dans notre culture où l’on est taxé de senior de plus en plus tôt. Comment sortir de ce paradoxe ?

La société diffuse l’image de vieux qui donnent l’impression d’être une charge, d’avoir le sentiment de plus rien avoir à vivre, si ce n’est la mort. C’est le cas de certains, mais beaucoup vivent leur âge autrement. C’est ce que cherchent à faire entendre des associations comme Old’up (lire page 34), le CNaV et autres. Par ailleurs, j’ai récemment reçu une femme de 47 ans dans un groupe de travail. Cela en dit long. Pour autant, plus on y réfléchit tôt, plus l’avancée en âge sera sereine, car il n’y a pas de baguette magique.

Jung compare l’existence à la course du soleil, qui s’élève jusqu’à son apogée, puis décline. Dans la première partie de la vie, c’est l’ego qui est aux commandes. L’individu doit mettre son énergie dans le moi, car l’enfant, puis l’adolescent, puis le jeune adulte se construit, construit sa vie, sa carrière, sa famille. Mais, aux alentours de 50 ans, il doit progressivement déplacer l’énergie du moi conscient vers le soi – Jung désigne ainsi l’être intérieur, l’essentiel, l’âme. Ce passage se travaille et demande du temps, mais il procure le sentiment d’accomplir sa vie. Il y a cependant des exceptions, comme l’écrivaine Christiane ­Singer, morte à 64 ans, terrassée par un cancer dont elle savait qu’elle ne se remettrait pas. Je l’ai vue, dans les six derniers mois de sa vie, faire le travail d’individuation qu’elle aurait pu mettre quarante ans à accomplir.

Mais alors, quel sens donner aux vies des jeunes qui sont fauchés par une mort violente, sans avoir pu accomplir cette alchimie d’eux-mêmes ?

Dans Une vie pour se mettre au monde (Le Livre de poche, 2011), écrit avec le philosophe Bertrand­Vergely, nous nous sommes interrogés sur les jeunesses fauchées. Et nous en avons conclu que toute vie est une œuvre. On peut effectivement se demander quelle est l’œuvre, au sens jungien d’individuation, d’un enfant qui meurt à 8 ans ou pire, à 8 mois. Pourtant, il a œuvré. Certes, il n’a pas accompli sa vie comme une personne plus âgée, mais sa courte existence aura transformé ses proches, ses parents, ses grands-parents. En cela, il a œuvré. Et cela a du sens pour l’humanité.

Vous parlez d’âme, et votre approche dépasse la sphère psychique. Comment articulez-vous psychologie et spiritualité ?

En France, on parle de psychisme parce que l’on n’ose pas parler d’âme, cela sonne trop religieux. Freud parle pourtant de Seele, « l’âme ». Les Américains l’ont traduit par mind, qui désigne le fonctionnement cognitif et n’a donc rien à voir. Le français a cru biaiser en se cachant derrière le mot grec de « psyché », mais celui-ci désigne l’âme, cet invisible qui puise dans les profondeurs ; ces profondeurs qu’on retrouve chez Jung. Le soi est peut-être aussi une bonne définition, car il implique le concept d’unité. C’est l’Être essentiel.

J’aime ce mot de profondeur. Je cite souvent un texte de Maurice Zundel, un prêtre suisse, teilhardien : « Rien ne nous interdit de penser que notre longueur d’onde caractéristique ne puisse subsister au-delà de la mort physique et venir informer un autre corps dont nous n’avons aucune idée. » Cette notion de longueur d’onde caractéristique m’intéresse. L’idée que nous ayons chacun une longueur d’onde unique, personnelle, qui s’enrichit de tout ce que nous vivons, comme une sorte de logiciel intime, est parlante, je l’ai constaté autour de moi. Quant à ce que celle-ci devient ensuite, c’est un mystère. Mais rien n’interdit de penser que cette vibration ne puisse aller informer d’autres corps ou un autre corps. Qui sait ?

La dimension religieuse ?

Je suis issue d’une famille catholique. J’ai cette culture en moi. Mais, aujourd’hui, ce qui me parle, c’est la notion de présence. Or, la présence est de la vibration, justement. C’est tangible. On peut ressentir une présence à l’intérieur de soi. L’appeler Dieu ? Tout au long de ma carrière de psychologue, j’ai évité d’utiliser des mots qui peuvent faire division pour me concentrer sur les expériences qui rassemblent. Celle de sentir, à travers la méditation ou la prière, ou bien dans certains lieux, que l’on est en présence, de manière mystérieuse, vibratoire. Difficile de le traduire en mots, car c’est de l’ordre de l’expérience et non de la croyance mentale. On est loin des dogmes et des pratiques.

La méditation est pourtant une pratique…

Certes, mais ce n’est pas un rituel, et avant tout elle s’éprouve. Je me situe dans le sillage de ceux qui pensent que Dieu ne se prouve pas, mais s’éprouve. Et je l’éprouve tout particulièrement lorsque je passe à Taizé, en Bourgogne. Cette communauté œcuménique réservée aux jeunes est un lieu de recueillement basé sur le silence, le chant répétitif, la méditation d’une parole. La vibration y est palpable. Et quand je vois sur le visage des jeunes issus de tous les horizons, religieux ou non, venus de toute l’Europe, qu’ils vivent cette intériorité, cela me donne beaucoup d’espoir.

Relier à la profondeur, n’est-ce pas toute l’œuvre de votre vie ?

On peut le voir ainsi. Mais est-ce une œuvre ? C’est ce qui me paraît en tout cas le plus essentiel. Les épreuves de la vie obligent chacun à aller chercher à l’intérieur de lui-même ce qu’il ne peut trouver à l’extérieur. Cela n’a rien à voir avec un repli sur soi ou un enfermement. Au contraire, il s’agit d’un approfondissement qui amène à s’ouvrir davantage, à être encore plus présent à ce qui est là, dans l’instant. Cette qualité de présence, je l’ai trouvée chez des personnes très âgées. Des êtres qui rayonnent d’une vie intérieure riche. Qui assument la solitude grâce à cette richesse intérieure et qui, en même temps, restent ouverts au monde, aux autres, en prise avec l’actualité. Ces beaux vieillards nous prouvent que plus on ouvre son esprit, plus on sera ouvert de cœur. 

Bio express
1946 : Naissance à Lyon.
1972 : Professeure d’anglais, elle reprend des études pour devenir psychologue. Entre en psychanalyse.
1975 : DESS de psychologie clinique et DEA de psychanalyse à l’université Paris-VII.
1975-1982 : Psychologue au planning familial.
1982-1986 : Exerce en psychiatrie.
1987-1996 : Psychologue dans la première unité de soins palliatifs en France, créée par le professeur Maurice Abiven à l’hôpital
de la Cité universitaire.
1995 : Parution de la Mort intime (traduit en 22 langues).
2003 :  Remise d’un rapport sur la fin de vie au ministère de la Santé.

À lire
La Mort intime, préfacé par François Mitterrand, Pocket, 2006.
L’Art de mourir, avec Jean-Yves Leloup, Pocket, 2000.
La Quête du sens, ouvrage collectif, Albin Michel, 2004.
Le Grand Livre de la tendresse, Albin Michel, 2002.
Le Souci de l’autre, Pocket, 2005.
Mourir les yeux ouverts, Pocket, 2007.
Nous ne nous sommes pas dit au revoir, Pocket, 2002.
La chaleur du cœur empêche nos corps de rouiller, Pocket, 2010.
La Sagesse d’une psychologue,
L’Œil neuf, 2009.
Qu’allons-nous faire de vous ?, avec Édouard de Hennezel, Le Livre de poche, 2013.
Nous voulons tous mourir dans la dignité, Pocket, 2015.
J’ai choisi de me battre, j’ai choisi de guérir, avec Claude Pinault, Robert Laffont, 2014.
L’Âge, le Désir et l’Amour, Pocket, 2016. Précédemment paru sous le titre Sex and Sixty. Un avenir pour l’intimité amoureuse, Robert Laffont, 2015.
Croire aux forces de l’esprit, Fayard, 2016.
Vivre avec l’invisible, Pocket, 2022.

Marie de Hennezel : « Une vieillesse heureuse et féconde est possible »