Votre film spirituel du week

Dans le bouleversant documentaire Et les Mistrals gagnants,
Anne-Dauphine Julliand suit des enfants gravement malades dans les couloirs des hôpitaux. Une leçon de vie et de courage.

C ’est le visage d’Ambre qui ouvre le film : la fillette joue avec entrain et grands éclats de rire. Qui se douterait qu’elle est gravement malade, bientôt en soins palliatifs à domicile ? Nous faisons ensuite connaissance avec Camille, qui affirme avec conviction : « Je veux aller à l’école, c’est tout ce que je dis. »

Charles part en courant dans les couloirs à la recherche de son copain Jason, avec lequel il se lance dans une danse endiablée. Il est gai pendant le bain qui soulage ses plaies – « ma peau, c’est comme une aile de papillon » –, mais craque lors de l’étape plus douloureuse des pansements. Et voilà Imad, le plus bavard, si fier de raconter son départ d’Algérie en avion pour « atterrir direct sur la France » et rejoindre l’hôpital.

La sagesse des enfants

Ce qui frappe le spectateur, c’est d’abord le courage de ces enfants. Aucun n’est dans la plainte ; ils jouent, rient, jardinent, font de la trottinette ou du ski. Pourtant, ils savent : les médecins leur ont expliqué, avec les vrais termes techniques, qu’ils sont sérieusement atteints.

Insuffisance rénale, greffe, neuroblastome, tumeur bénigne ou maligne… ils parlent avec naturel et lucidité de leurs pathologies. Mais, « quand on est malade, ça n’empêche pas d’être heureux… rien n’empêche d’être heureux ». Celui qui s’exprime avec une telle sagesse n’a que 9 ans ! 

Belle leçon de vie que ce documentaire bouleversant ! La caméra placée à hauteur d’enfant est le témoin discret de ce quotidien peu ordinaire. Les adultes s’effacent, laissant au premier plan les petits malades. Où ces enfants puisent-ils autant de vaillance et d’énergie ?

L’amour est plus fort

Le personnel hospitalier ne se contente pas de soigner, il accompagne avec tendresse et une infinie délicatesse ces petits patients, adoptant un vocabulaire ludique – « Chef, il faut t’examiner… garde-à-vous ! » – et leur offrant une vraie vie sociale de leur âge où le jeu tient une grande place. Et quand on fait du théâtre, on choisit une histoire qui dédramatise l’issue fatale, « car l’amour est plus fort que la mort ». C’est Ambre qui l’énonce, après avoir demandé à son partenaire d’« ouvrir le portail de la mort ». 

De fait, l’amour rayonne dans la douceur de ces mains qui palpent et pansent, dans la gratuité de ces moments précieux où l’adulte raconte une histoire ou écoute patiemment leur babillage. Les parents ne sont pas en reste, assumant le week-end les soins quotidiens indispensables, parce que, à la maison, c’est la joie de retrouver aussi un frère ou une sœur.

Une vie aussi intense que fragile

Bien sûr, la nostalgie n’est pas absente de ce regard sur les instants précieux qui, trop vite, ne seront plus que des souvenirs, comme les « bonbecs » et les « Mistrals gagnants » que chante Renaud. Pourtant, l’espoir triomphe, car, « s’il y a quelque chose qui va pas, c’est pas grave, c’est la vie ! ».

Oui, « la vie est là, simple et tranquille… », une vie d’autant plus intense qu’elle est fragile, comme les petites tulipes sortant de terre que Tugdual caresse. Qu’importent sonde, canule, ­pansement, plâtre ou corset, le bleu du ciel crève l’écran, promesse de bonheur possible au-delà de la souffrance et de la mort. |

Une présence au cœur de la maladie

Par Deux Petits Pas sur le sable mouillé, récit de la maladie et de la mort de sa fille Thaïs, Anne-Dauphine Julliand touche un large public en 2011. Elle témoigne de la foi qui les a portés, son mari Loïc et elle, dans ce terrible calvaire : « Nous avons ressenti, tout au long de cette épreuve, de façon très forte, la compassion de Dieu. » Après Thaïs, Azylis, une seconde petite fille, succombe à la même maladie et Anne-Dauphine montre la même confiance en Dieu.

Réalisatrice du documentaire Et les Mistrals gagnants, convaincue que la maladie est une invitation à retrouver l’esprit d’enfance, elle ne glisse qu’une allusion discrète à la foi : une courte scène nous fait suivre une famille entrant dans une petite chapelle pour y allumer des lumignons. Respect de ceux qui ne croient pas, refus d’un commentaire indiscret, on imagine facilement les raisons de cette réserve – mais ce film parle de Dieu sans le nommer.

Michèle Debidour est diplômée de théologie et de cinéma, et a présidé le jury œcuménique de Cannes. Elle nous introduit au message spirituel d’un grand film disponible en DVD et en VOD et nous offre par le septième art un beau support pour méditer sur la condition de l’homme et la transcendance.

Cet article est extrait du mensuel Prier.

Votre film spirituel du week-end avec le mensuel Prier : Et les mistrals gagnants, d’Anne-Dauphine Julliand