Danser et chanter à la gloire du tonkatsu et des nouilles instantanées

Au moment où j’ai quitté le bureau pour rejoindre Aili dans le centre ville de Bruxelles, je repensais aux entretiens musicaux que j’ai fait cette année, et je me disais que c’était la première fois que j’allais faire connaissance avec une artiste dont je ne connaissais quasi rien. J’avais juste écouté son EP. Cinq sons pour me convaincre qu’il y avait un truc à creuser, au-delà de sa musique entraînante et ses paroles non-assimilables (elle chante en japonais).

Il n’aura fallu que quelques chansons sorties en 2021 pour qu’Aili et son binôme Transistorcake attirent un peu l’attention. Pour l’instant, le duo a plus posté de photos soignées et stylées qu’il n’a de pistes à faire tourner, mais le premier EP, Dansu, cumule déjà des centaines de milliers de streams. Les morceaux déchirent mais, surtout, rythment la plupart de mes après-midi, quand je fais semblant de bosser.

Aili est née d’un père tokyoïte et d’une mère anversoise. Et vu qu’on n’avait jamais parlé de Japon à une musicos, ni de musique à une Belgo-japonaise, on l’a captée la veille de son concert à l’AB, dans le cadre de la soirée Braindance, pour faire connaissance autour d’un café. 

VICE : Yo Aili, tout roule pour toi ?
Aili :
Ça roule, je travaille beaucoup en ce moment. Ma matinée était plutôt bonne. En ce moment, je fais de l’intendance pour Volta tous les mardis jusqu’à 13 heures. Je suis juste là pour nettoyer, voir si tout le monde a ses affaires, si les musicien·nes vont bien. Une sorte de concierge, entourée de musique. C’est bonne ambiance.

Donc t’as aussi le temps de te concentrer sur ton propre projet ?
Ouais, vu que c’est seulement une fois par semaine, le reste du temps je retrouve Orson à Gand pour faire de la musique. À coups de trois fois par semaine, c’est intense. En ce moment, on fait aussi pas mal de musique pour des séries. C’est super nouveau pour moi, mais j’adore ça. Y’a notamment une série qui s’appelle Hacked. C’est un monde totalement nouveau qui s’ouvre à nous, on peut expérimenter beaucoup de choses. T’es plus dans la réflexion de faire de la musique à travers des sentiments ; ce qu’on fait en duo est davantage orienté dance, plus électronique. Ici, on parle d’ambiance, d’évasion par le son. Tout doit correspondre aux visuels, du coup on essaye d’imaginer ce que les personnages ressentent et de le traduire en musique. C’est un scénario musical, si tu veux.

Et ton projet perso alors ? Ça t’est venu comment ?
Comment ? Y’a tellement de points différents à raconter. 

« C’est bien de savoir que beaucoup de gens ne comprendront pas ce que je raconte. »

On a le temps.
Tout a commencé quand j’avais 7 ans… Non, je rigole. Bref, à 17 ans, je faisais de la musique toute seule dans mon coin avec ma guitare. Quand j’ai bougé à Gand pour faire mes études, j’ai rencontré Orson et ç’a cash collé. De mes 20 ans jusqu’à maintenant, on n’a pas arrêté de bosser ensemble. J’avais jamais eu une telle complicité créative avec quelqu’un. Quand ça marche, faut aller jusqu’au bout des choses et en profiter. On est sur des projets assez divers maintenant, mais ça nous correspond toujours musicalement. Et personnellement. Sinon, on essaye de faire un album, genre, on « ESSAYE ». C’est la première fois qu’on fait ça. On avait déjà sorti un EP l’année dernière qui était vraiment bien, mais du coup on aimerait bien surfer sur cette vague et continuer un truc plus approfondi. J’ai aussi quitté mon ancien job, j’essaie de voir ce qui va se passer, peut-être que c’est super stupide, peut-être que c’est le bon moment dans ma vie. J’ai pas d’enfants, j’ai pas comme projet d’acheter une maison, alors pourquoi pas foncer tête baissée et faire ce que j’aime.

On a cherché un peu la signification de ton prénom et on tombait surtout sur des étymologies estoniennes ou finlandaises… Ça raconte quoi en japonais ?
Ah vraiment ? C’est bien japonais, c’est le mélange de deux mots : « Ai » veut dire « harmonie » et « Li » c’est « bénéficiaire ».

Donc je suppose que l’un dans l’autre, ça donne « celle qui bénéficie de l’harmonie » ? Pas si mal pour une musicienne.
Pas mal, ouais ! J’avais pas vraiment vu le rapprochement mais ça colle parfaitement. Au Japon, on utilise des caractères différents pour les mêmes syllabes. « Ai » peut aussi se traduire par « amour » mais ma mère a choisi le « Ai » qu’on retrouve dans « Aïkido », qui est celui qui signifie harmonie.

Quand on cherche ton nom sur Google, même si c’est que 4 lettres, t’es directement dans le top. Quelle fame déjà, non ?
C’est marrant de ressortir gagnante de cette logique d’algorithmes. C’est cool, à nous la gloire. Non, plus sérieusement, faire partie de ce grand monde globalisé qu’est Internet, c’est bien quand t’es une artiste. Bien sûr, je me suis déjà googlée et ça m’a fait bizarre. Juste avec mon prénom, je tombe encore sur des trucs que j’avais fait à mes 17-18 ans. Y’a pas mal de vieilleries comme des articles que j’ai signés avec mon vrai nom et qui apparaissent encore quand on veut me trouver sur les moteurs de recherche. C’est un peu effrayant, je t’avoue. Quand tu stalk un peu, y’a des photos super drôles de moi quand j’avais 14 ans. Avec Facebook, j’ai pu faire le tri sur mon compte, mais quid d’Internet dans sa globalité, où tu maîtrises pas forcément ce qu’il reste ? C’est parfois un casse-tête. 

Pour en revenir au son, tu t’es dit que chanter en japonais c’était un créneau à prendre ?  C’est plutôt rare en Europe.
Non, c’était pas du tout un truc prémédité. Au début, j’avais un style bien différent et puis, petit à petit, on a évolué vers ce que je fais aujourd’hui. Le processus est toujours le même : on s’occupe d’abord de la rythmique et ensuite je rajoute les paroles. En fait, je sais pas pourquoi, mais un jour on était en train de jammer et l’idée de chanter en japonais m’est venue spontanément. En soi, on a jamais eu la prétention de sortir quoi que ce soit. On en a, des projets qui ne sont jamais sortis. Le japonais est une langue très rythmée, et comme la musique qu’on fait l’est tout autant avec sa nuée de beats ou de synthés, ça correspond parfaitement. J’avais pas du tout misé sur le côté « Oh, personne fait ça, viens on le fait ». Peut-être que c’était quelque chose qui est apparu comme ça, d’une prise de conscience par rapport au fait qu’il n’y ait pas beaucoup de représentations d’Asiatiques en Belgique… Mais bon, c’était plus pour le processus créatif qu’une déclaration politique.

Tu chantais dans quelle langue avant ça ?
En anglais, mais j’avais du mal avec les paroles. Intérieurement ça joue aussi, c’est l’une des raisons pour lesquelles je me lâche plus en japonais. C’est bien de savoir que beaucoup de gens ne comprendront pas ce que je raconte. C’est très libérateur pour moi. Je connais pas le pourcentage de musiques chantées en anglais, mais c’est trop. D’un point de vue personnel, si je balance quelque chose que tout le monde comprend, ça devient super personnel. Limite trop. J’ai juste peur que ce soit comme pour les photos sur internet, que les paroles restent là pour le restant de ta vie et que tout le monde en sache trop sur ce que je voulais chanter à cette période. C’est bien de garder un peu de mystère en chantant en japonais.

T’as quitté le Japon à tes 7 ans. Ton japonais a évolué depuis ou c’est toujours celui de la petite fille d’avant ?
C’est resté exactement pareil. Mon père vit toujours au Japon, la seule langue qu’on utilise pour communiquer c’est le japonais. C’est une langue très difficile, il y a tout un pan de la langue qui est très formel et un autre informel. Savoir jongler avec ça, c’est très difficile, et j’ai pas ce niveau. Quand j’avais 7 ans, j’avais des bases en japonais et c’est resté comme ça. Mon père, ma sœur et moi, on parle japonais entre nous mais c’est très spécial. Je pense qu’on a créé presque notre propre langue, notre japonais à nous, un truc de famille, plus pour se comprendre qu’autre chose. La chanson Pari Pari en est un bon exemple. Elle fait référence à un plat appelé Tonkatsu mais à la maison, on l’appelle Pari Pari. Il y a beaucoup de ces mots qu’on utilise dans des contextes différents. Mais bon, tant qu’on se comprend c’est l’essentiel, c’est ça le but de la communication non ?

Grave. Et tu sais si ç’a une répercussion sur ton public qui comprend le japonais ? 
En septembre, on est allé·es au Japon pour la première fois, pour un concert. C’était incroyable, une vraie expérience. On a essayé de se faire des contacts dans l’industrie, de parler à des gens pour commencer quelque chose là-bas. Depuis que notre nom a été annoncé à la radio, on a de plus en plus de fans japonais·es, qui disent tou·tes « C’est une façon tellement créative de parler japonais », « C’est différent mais je peux m’identifier à ça » ou encore « C’est tellement kawaii la façon dont vous chantez. » Ça plait ! Y’a probablement un paquet de gens qui n’aiment pas ce qu’on fait, mais c’est les personnes qui nous suivent pas, du coup on doit pas faire face à des commentaires désobligeants ou quoi que ce soit d’autre.

Ça fout une pression supplémentaire de réussir au pays ?
Je me suis sentie plus légitime au moment de faire ma musique justement parce que je suis à moitié japonaise. Au début, j’étais terrifiée à l’idée de jouer au Japon, parce que je suis « qu’à moitié japonaise ». Est-ce que je dis les bonnes choses ? Est-ce que j’ai les bons mots ? Est-ce que je suis impolie, maladroite ou carrément irrespectueuse ? Au Japon, c’est crucial d’être correct, dans les clous. Dans un contexte formel, t’as ce code de politesse qu’est imposé et moi je l’ai pas du tout. Mais je trouve ça normal de chanter en japonais. Je suis pas qu’à moitié : je suis double. De mon père et de ma mère. C’est pas parce que t’es moitié que t’en fais pas partie, t’as juste une perspective différente.

En parlant de kawaii, il y a pas mal de références à la culture japonaise en Europe, tu vois ça comme de l’influence ou plutôt de l’appropriation culturelle ?
Je sais pas vraiment d’où ça vient. Il y a toujours eu envers le Japon, cette admiration, je dirais, pour cette pop alternative. Le Japon a toujours eu une grande influence sur la scène musicale. Et avec l’arrivée des mangas et des animes aussi, ça s’imprime dans la culture de l’Europe de l’Ouest. Mais pour moi c’était pas de l’influence, j’ai jamais été prise par ce genre de codes au moment de produire. J’ai quelques références mais je veux pas m’en servir ni les stéréotyper. Je fais les choses à ma façon, comme elles conviennent à nos projets, avec des références subtiles, sans être trop évidentes.

J’ai justement supprimé une de ces questions sur les influences parce que c’est ce que tout le monde demande, genre « Est-ce que tu dirais que ton style se situe entre Yellow Magic Orchestra et Soulwax ? »
C’est toujours les questions les plus difficiles à répondre. La musique c’est un processus, les gens posent la question rétrospectivement, mais quand tu composes t’es dans l’ouragan de ce qui se passe. Bien sûr, quand on regarde en arrière, on se dit « Ça aurait pu être une influence », parce que ça correspond à la façon dont on en parle maintenant. On pense pas à ça quand on le fait, c’est facile d’inventer une histoire après coup. Je suis quelqu’un de très spontanée, du style « On s’amuse et on voit ce qui se passe ». Quand t’es dans ta propre bulle, tu t’isoles de tout ce qu’il y a autour.

« On traverse tout un processus, on fait une crise pendant une semaine, on pleure, on s’ennuie, on sent que ça a un impact sur soi, mais on n’a toujours pas le sentiment d’être Japonaise. »

J’ai adoré quand t’as dit « Je suis pas qu’à moitié : je suis double ». Moi-même j’ai une double culture, je me suis souvent tapé cette question stupide : « Est-ce que tu te sens plus ceci ou cela ? » Ça t’arrive aussi ?
Bien sûr, à chaque fois. Je sais pas quoi répondre parce que pour moi, ça change tous les jours. Avoir cette double identité c’est plus un processus qu’un fait réel. C’est une évolution constante. Plus je vieillis, plus j’y pense. Quand je reviens du Japon, je suis quelqu’un de différente. On traverse tout un processus, on fait une crise pendant une semaine, on pleure, on s’ennuie, on sent que ça a un impact sur soi, mais on n’a toujours pas le sentiment d’être Japonaise. Une sorte de crise d’identité. C’est une partie de moi, mais en même temps pas vraiment. Certains jours, je me sens plus Japonaise, d’autres plus Belge, je fluctue. C’est difficile à dire. Qu’est-ce que ça veut dire être Japonaise ou être Belge ? Rien de très concret. 

Vivre là-bas, c’est une option pour toi ?
Pas vraiment, pour quelques mois… Allez, un an max. Mais je m’y installerais pas. C’est bizarre, non ? Wow. Mmmmh. Argh. Quand j’ai déménagé ici j’avais 7 ans, donc beaucoup de choses que j’ai vécues au Japon, j’en n’étais pas réellement consciente. J’ai pas mal de souvenirs, mais j’agissais pas vraiment sur ce qui se passait. Quand je suis arrivée ici, j’ai grandi et depuis, je sais pourquoi je suis en Belgique, c’est chez moi.

Chaque fois que je retourne au Japon, je vois à quel point c’est génial, mais c’est extrêmement différent. Sur le plan culturel, je passe d’un extrême à l’autre. Je sais pas si je serais capable de m’adapter totalement à un pays si fermé, à cette mentalité si différente, c’est difficile de se projeter. Il y a toujours une partie de moi qui veut explorer d’où je viens, aller d’Hokkaido jusqu’à l’extrême sud, sans y vivre mais en essayant de comprendre la culture.

Aussi parce que t’as encore de la famille là-bas ?
C’est aussi la raison pour laquelle j’ai encore plus l’impression d’avoir une double culture, parce que mon père n’a jamais été là, en Belgique, avec moi. C’est pour ça que quand les gens me demandent comment c’était de s’adapter ici et d’avoir ma culture japonaise, c’était pas forcément le cas parce que ma culture japonaise est restée un peu au Japon. Mon père venait trois fois par an, c’est très différent.

Ça te manque, le Japon ?
Bien sûr, ça faisait 3 ans que je m’y étais pas rendue. En général, j’essaie d’y aller chaque année, ça m’avait vraiment manqué. Ça peut paraître bizarre mais parfois, quand je marche dans les rues de Bruxelles, il y a une sorte de nostalgie. Il y a cette odeur qui sort des ventilateurs des restaurants qui me rappelle le Japon. La bouffe fait partie intégrante de la culture du pays. L’odeur peut parfois toucher tes émotions, c’est différent de la vue ou des autres sens, c’est quelque chose de mélancolique. La mentalité du pays me manque quand je suis ici : la structure, la politesse, l’efficacité, le respect. En parlant d’efficacité… Rien que les trains par exemple : toute la SNCB devrait faire un stage au Japon pour voir comment ça marche.

T’aurais envie qu’on t’enterre là-bas ?
Quand mon grand-père est mort, c’était si différent de ma grand-mère ici. Niveau spiritualité, c’était fou, le corps est resté dans le salon pendant quelques jours et les gens entraient et sortaient. Tout le processus de crémation prend du temps, en fait. Tu dors dans le crématorium, avec tout le monde, on mange ensemble, on lave le corps. Quand les restes sortent du four, le famille doit prendre les os avec des baguettes, c’est très intime et un peu effrayant à la fois. Surtout quand t’as 12 ans. Je sais pas comment je veux qu’on se souvienne de moi, je sais pas comment ma famille ou mon copain veulent se souvenir de moi. Peut-être dispersée dans la mer, peut-être enterrée près d’un arbre, peut-être que certaines parties de moi, comme mes écouteurs ou mes livres, seront déposées chez des gens qui me sont chers. Mais honnêtement, j’y ai jamais pensé.

T’as beaucoup souffert d’asiaphobie ici, en Belgique ?
On m’a toujours fait comprendre que j’étais pas tout à fait d’ici. Quand je me présentais, on me demandait souvent « Tu viens d’où ? » et je répondais « D’Anvers, et toi ? ». Et, souvent, s’en suivait la question la plus agaçante : « Non non, tu viens d’où, vraiment ? » Ç’a dû t’arriver aussi j’imagine ? J’en joue parfois, je force les gens à deviner, mais personne n’y arrive du premier coup. Je me souviens qu’à mon arrivée en Belgique, je sentais qu’il y avait quelque chose de différent quand mon père venait me rendre visite. L’atmosphère changeait, ma perception des choses lorsqu’on se promenait dehors était différente. Les gens nous dévisageaient. J’étais déjà très peu sûre de moi… C’est si douloureux à dire, mais parfois je voulais pas sortir avec lui à cause du poids des regards.

Mon père est créateur de mode, plutôt extravagant, ce qui est vachement cool en soi. Mais entre le fait de ne pas venir de Belgique couplée à son extravagance, ça me faisait me dire : « Merde, je veux me fondre dans la masse, pourquoi les gens me regardent si différemment ? » Quand mes parents me préparaient des bentos, c’était très bon mais parfois c’était des plats à base de choux et ça peut vite sentir mauvais, j’avais l’impression que tout le monde me regardait. Et même si c’était pas du racisme, c’était parfois les stéréotypes du genre : « Oh t’es Japonaise, c’est quoi ton manga préféré ? » Pour info, ça me botte même pas les mangas, donc bon…

 « Je me souviens qu’on était à Plopsaland, et le directeur de l’hôtel n’a pas voulu nous laisser entrer parce que mon père “n’était pas d’ici” »

Plutôt dans les stéréotypes que du racisme pur et dur, donc…
Ouais… Ah non, un jour je me souviens qu’on était à Plopsaland, sur la côte, et le directeur de l’hôtel n’a pas voulu nous laisser entrer parce que mon père « n’était pas d’ici ». Sans aucune justification. C’était assez triste. Mais en général, c’est juste de la curiosité déplacée, oui. Je pense que ç’a quelque chose à voir avec le fait qu’on n’a pas vraiment de modèles médiatisé·es pour les Asiatiques ici en Belgique. Prends la télévision par exemple, c’est pas fou, on voit jamais vraiment de personnes asiatiques sur les plateaux. Après toute la haine dont les gens ont souffert à cause du Covid et toute la désinformation envers les Asiatiques, partout les gens ont contrebalancé ça en donnant plus de visibilité… Mais je pense qu’en Belgique et en Flandre, on a encore raté le coche. 

T’as jamais souffert de fétichisation en tant que femme asiatique ?
Me faire sexualiser tu veux dire ? Pas tant que ça, mais je me souviens de remarques insinuant l’obéissance sexuelle chez les femmes asiatiques. J’ai entendu ça une ou deux fois, pas forcément sur moi mais oui, ça m’est arrivé. Le premier réflexe aujourd’hui c’est de dire : « T’as aucun droit de me parler pas comme ça, t’es juste dégueu. » Maintenant je suis assez grande pour savoir comment répondre, mais pendant longtemps la première chose qui me venait à l’esprit c’était : « Comment je me défends face à ce genre d’agression ? » Puis par la suite, je me disais : « Merde, j’aurais dû répondre plus franchement ou plus agressivement. »

C’est bien de voir comment ça évolue de nos jours à propos du sexisme, du racisme… c’est plus ouvert. Ça me donne plus d’espace pour me connaître, comprendre des choses qui se sont passées dans mon passé, redéfinir des choses qui n’étaient pas correctes et que j’évitais sans trop le savoir.

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