Pacôme Thiellement et les 7 poètes de Paris  

Pour cet entretien, on s’est installé à l’Éléphant du Nil, 125 Rue Saint-Antoine. Au bout d’une conversation aussi agréable qu’enrichissante, où la mystique s’est invitée naturellement au vu des thèmes de prédilection de Pacôme Thiellement, une dame avec un voile de chrétienne orientale est apparue. Tournée vers l’auteur, elle ne lui a rien demandé, mais simplement offert un sourire de bienheureuse, avant de louer sa bonté. Quand on regarde trop les profondeurs, les profondeurs vous regardent aussi.  

ActuaLitté : Comment avez-vous construit ce livre ?

Pacôme Thiellement : Comme pour les autres livres, je n’avais pas de plan de départ. Je n’ai aucune idée sur où je vais. J’ai des intuitions et le plan se réalise en même temps que l’œuvre. En revanche, quand l’ouvrage est achevé, il y a un plan. Il y a des choses que j’enlève, que je déplace, mais ce ne sera jamais à priori. Ce n’est pas drôle sinon.

Par exemple, n’ayant pas le moindre intérêt pour les Champs-Élysées, je ne pensais jamais en faire un chapitre. Ça a été une surprise totale. Il s’est trouvé que j’avais quand même quelque chose à dire par rapport à cette immense arnaque : Mon anti-Paris. (rires)

En outre, je réalise un travail d’exégèse depuis maintenant de nombreuses années. J’ai commencé avec des disques et des séries télévisées, c’était déjà une bizarrerie. À la base, l’exégèse est adaptée aux textes sacrés. J’avais décidé que mes textes sacrés seraient les albums des Beatles ou les épisodes de la série Twin Peaks. J’ai traité par la suite, entre autres, d’événements personnels, de faits divers…

Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire un tel ouvrage ?

Pacôme Thiellement : D’abord, simplement, parce que c’est une ville où j’ai quasiment toujours vécu, éprouvé mes grandes émotions et porté mes questionnements. Ensuite, j’écris des livres que j’aimerai lire. Quand j’ai l’impression qu’une œuvre sur un sujet manque, je l’écris dans la perspective du lecteur que je suis. J’ai rédigé La victoire des Sans Roi par exemple, car il manquait, de mon point de vue, ce lien entre ce qu’on a appelé les gnostiques, ce qu’on a désigné sous le terme de manichéens, les cathares, les poètes maudits, et le monde d’aujourd’hui. 

Quand j’ai écrit Sycomore Sickamour, c’est pour combler l’absence du livre sur l’amour malade et sa transfiguration possible, que ce soit à partir de Shakespeare ou des films de David Lynch. Quand j’ai écrit l’Enquête infinie, il me semblait qu’il manquait un livre qui fonctionne comme une sorte d’enquête policière dont on n’aurait jamais le bout. Là j’ai pensé qu’il fallait un ouvrage sur Paris qui ne soit pas le Paris de Lorànt Deutsch (rires), mais une mise en écho à la fois des mythes, de l’Histoire, du parcours des poètes et de mon parcours dans la ville. En gros, faire du Léon-Paul Fargue, mais à travers l’Histoire.

L’Enquête infinie, plus de 500 pages, est sortie fin 2021, et un an plus tard, paraît ce nouveau livre très dense. Les publications s’enchaînent.

Pacôme Thiellement : J’ai véritablement travaillé sur Paris des profondeurs entre janvier 2021 et janvier 2022. Dans l’Enquête infinie, il y a plusieurs éléments qui sont des appels pour ce livre : l’entrée de la rue Pierre-Nicole y est déjà ou un petit peu de Paris, ville d’Isis. Je me suis décidé à écrire sur ce sujet à la fin de l’année 2020, au moment où je termine l’Enquête infinie, en décembre 2020.

C’est aussi le premier ouvrage que vous publiez au Seuil.

Pacôme Thiellement : En gros, j’avais le projet de cet ouvrage, et j’en ai parlé à Chloé Delaume, qui est une amie de 22 ans et qui est auteure et membre du comité de lecture du Seuil. Elle en a parlé à Hugues Jallon (Président du Seuil et éditeur) qui a apprécié l’idée et qui est l’éditeur du texte. J’ai tout discuté et négocié avec lui directement. Tout a été vraiment simple. Il savait déjà que je rendais les livres à temps.

Comment avez-vous déniché toutes ces informations sur Paris ou en rapport avec Paris ? Des découvertes au fil des décennies ? Des lectures ? Une qualité d’observation ? 

Pacôme Thiellement : Le point de départ de l’œuvre trouve sa source dans les balades obsessionnelles que je faisais dans Paris, et plus précisément, la redécouverte, 30 ans après l’année du baccalauréat, rue Pierre-Nicole, dans le 5e arrondissement, des fausses ruines qui s’y présentent. Elles ont produit un choc en moi. J’ai alors commencé à me poser des questions sur cette entrée et cette rue où on retrouve, en réalité, la crypte inaccessible de Saint-Denis. Cette genèse, que je raconte au début du livre, est en vérité une manière de synthétiser en un épisode une méditation qui se prolonge depuis de longues années.

Quant aux informations, beaucoup d’aspects du texte sont arrivés par l’entremise de la chance. Par exemple, être devant la fontaine du Fellah, rue de Sèvres, et avoir quelqu’un qui me dit qu’on peut trouver l’original dans une cour d’entrée. C’est se rendre disponible à l’esprit du lieu, donc plus qu’au simple hasard en réalité. Plutôt le fameux « hasard objectif » d’André Breton : d’étranges résonances, des parallélismes, des analogies, des correspondances… Se compose alors lentement le labyrinthe du livre qui répond au labyrinthe de la ville.

Fontaine du Fellah, située au 42, rue de Sèvres dans le 7e arrondissement de Paris. Construite en 1806. Siren-Com (CC BY-SA 3.0).

J’ai gardé des plantes rares dans le temps. Ces moments de soudaines synchronicités. Ce sont des instants ou la géographie est signifiante, comme découvrir que l’hôtel où Nadja a fait sa crise de folie avant d’être internée rend une incroyable fresque murale qui représente une sorte de nœud de serpent qui explose. Sachant que l’exégèse ne répond pas aux exigences du sérieux scientifique, je me suis autant appuyé sur des textes de folklore bizarroïdes de XVIe-XIXe siècle que sur des recherches plus universitaires. J’ai mis ces deux types d’ouvrages en balance.

C’est enfin une synthèse de plein de choses accumulées à travers les années : Une vie entière à Paris d’abord. Le livre suit un peu mon histoire dans la ville. Les souvenirs démarrent l’année de mes 17 ans, et, à mesure que l’œuvre avance, on se rapproche d’aujourd’hui, jusqu’au premier chapitre où on retourne dans les premières années. J’ai un peu spoilé, mais on s’en fout. (rires)

Comme dans vos précédents ouvrages, vous cherchez les signes du sacré qui pointent dans le monde profane. Votre texte est il, en creux, un plaidoyer pour la « science des analogies » face à la raison aristotélicienne ?

Pacôme Thiellement : Je ne peux pas faire autrement. Si la seconde approche me paraît assez limitée, je ne cherche pas à entrer en polémique. Dans ce livre, comme dans le précédent, j’ai essayé d’aborder, et ce n’était pas simple pour moi, car je suis arrivé tardivement à l’étude de l’Histoire, des événements historiques avec un prisme qui n’exclut pas la dimension spirituelle, comme l’opposition entre les Armagnacs et les Bourguignons, fin XIVe — début XVe siècle.

En outre, très souvent, la lecture « métaphysique » de l’histoire a été l’apanage de la droite ou de représentants de courants réactionnaires. Les fameux « antimodernes ». Un poète que j’adore, comme Baudelaire, après une jeunesse de révolté, va épouser une vision réactionnaire. Fréquemment, ce sont en réalité des révolutionnaires déçus par les acteurs de ces révolutions.

Comparé à d’autres de vos textes, on retrouve moins de récits personnels de votre vie.

Pacôme Thiellement : Je ne pensais pas, pour ce sujet, être le plus intéressant. Si mes souvenirs entraient en résonance avec les lieux, je les mettais. J’y narre notamment les dérives alcoolisées de mes 20 ans autour de Notre-Dame. J’avais à cette époque un groupe d’artistes, Spectre. Les belles années autour du Quartier latin, quand je pouvais tenir plusieurs jours sans dormir… (rires)

Également un événement que j’avais évoqué plus en détail dans mon livre le plus autobiographique, Tu m’as donné de la crasse et j’en ai fait de l’or, sur le suicide de mon épicier, installé rue de Maubeuge, dans le 9e arrondissement. Un suicide rue Choron où est né Hara-kiri…

La manière dont vous avez de partir, dans la plupart de vos essais, d’un point précis avant de dériver, semble être parfaite pour parler d’une ville.

Pacôme Thiellement : J’en avais l’intuition, parce que le premier parcours de poète que j’ai tenté de retracer obsessionnellement est celui de Gérard de Nerval. J’ai commencé il y a 15 ans, quand j’habitais rue de Maubeuge, et que je relisais encore et encore Aurélia. En refaisant de manière compulsive le parcours de ce poète de cœur, je me suis rendu compte qu’il y avait plein de choses qui entraient en résonance. Ça m’a servi d’indice pour faire la même chose avec les autres grands poètes de Paris.

Crypte Notre-Dame-des-Champs sous l’immeuble du 14 bis, rue Pierre-Nicole. Benîot (CC BY-SA 4.0).

Pour Baudelaire ça marche bien, pour Lautréamont également. Pour Alfred Jarry, c’est plus contrasté. La ville de Paris bénéficie de la présence des poètes, où ils ont habité, ce qu’ils ont traversé, ou dans le cas de Rimbaud, ce qu’ils en ont espéré avant d’être exclus. Dans son dernier séjour, alors que Verlaine est en prison, qu’il a fini d’écrire sa Saison en enfer et qu’il est rejeté de tous, un témoignage raconte sa conversation avec un inconnu sur Emanuel Swedenborg dans un café, face au Luxembourg, devant une des portes des Valverts du diable.

Ce sont 7 poètes de Paris qui nous guident dans ce Paris des profondeurs.

Pacôme Thiellement : Victor Hugo, Gérard de Nerval, Charles Baudelaire, Lautréamont, Stéphane Mallarmé, Arthur Rimbaud, Alfred Jarry ont été spécifiquement cités dans le texte d’André Breton, Flagrant délit, comme les poètes ayant constitués la sensibilité moderne. Ce sont également eux qui ont, toujours selon lui, retrouvé, parfois sans le savoir, l’esprit des gnostiques, ou « les Sans Roi », nom donné dans les Manuscrits de Nag Hammadi découverts en 1945. Ils ont tous un rapport spécifique à Paris. Pour Hugo, ce que cette ville a de particulière, c’est l’esprit révolutionnaire. J’essaye de rendre compte du Paris post-révolutionnaire, qui commence avec Hugo et qui continue au moins jusqu’à Jarry. Après, plusieurs tenteront de raviver cette flamme, comme l’équipe du Grand Jeu.

Chacun de ces poètes porte un projet spirituel an-hiérarchique qui entre en écho avec la parole du Christ, telle qu’elle a été accueillie par les Sans-Roi, en parallèle à l’édification de l’Église chrétienne. Une approche qu’on peut d’ailleurs trouver dans l’ésotérisme de toutes les religions : la théologie négative dans le christianisme même, la Kabbale dans le judaïsme, le soufisme dans l’islam… Sans parler des grands visionnaires, comme Emanuel Swedenborg. Toutes ces visions tendent à une réappropriation individuelle par rapport à la divinité, court-circuitant la dimension hiérarchique organisée. Il y a donc également une dimension politique. C’est imbriqué. 

Justement, toutes ces réflexions spirituelles sont mises en relation avec des événements contemporains très concrets : les gilets jaunes ou le traitement des Roms.

Pacôme Thiellement : Ça participe d’un même esprit qui peut s’exprimer de façon spirituelle, artistique, éthique, et ici, politique.

Si les gilets jaunes sont loués, Sarkozy, Mitterand ou Pompidou le sont beaucoup moins…

Pacôme Thiellement : Y a-t-il beaucoup de choses aimables chez Sarkozy ou Pompidou ? Mitterrand, je l’appelle l’assommeur du Parti socialiste. C’est lié à la figure symbolique de Saint Marcel, évêque de Paris qui a vaincu un dragon qui terrorisait la ville. J’ai une vision très opposée dans le combat contre le dragon, étant du côté du dragon. Il protège le trésor, tout en étant en réalité le trésor lui-même. Les assommeurs de dragon, j’ai du mal. Cette créature est la dimension chaotique de la ville. Anne Hidalgo est une assommeuse de dragon. Haussmann aussi… Paris, c’est le dragon. C’est son caractère. De toute façon, un dragon est immortel : On ne fait que l’assommer.

La problématique des gilets jaunes ou des Roms permet de nous relier à une des grandes idées qui parcourent toute votre œuvre : Quand il y a mépris, c’est qu’il y a quelque chose d’important.

Pacôme Thiellement : Quand j’étais adolescent, mes premières émotions artistiques étaient liées à la bande dessinée, à la musique pop, aux séries télévisées. À cette époque, c’était considéré comme de la sous-culture. Rapidement, cette hiérarchisation des cultures m’a semblé incroyablement limitée. En réalité, ce sont les œuvres « populaires » d’une époque qui deviennent ensuite les classiques d’une autre.

Pacôme Thiellement. © Jérôme Panconi.

Cette révélation m’est apparue avec l’étude du cas Shakespeare. À son époque, c’est comme s’il écrivait aujourd’hui pour la télévision. Le théâtre élisabéthain est un lieu mal famé avec quelques aristocrates qui vont pour s’encanailler. Finalement, c’est ce qu’on a de plus grand en langue anglaise. La même chose avec le cinéma classique de Buster Keaton, Charlie Chaplin.. Pourquoi le rap fait criser encore certains : c’est porté par des Noirs qui pratiquent l’art du non-sens. Le rap contient les plus importantes œuvres d’art des 40 dernières années en musique. Ceux qui en doutent ne connaissent pas leur Histoire.

En revanche, il ne faut pas se tromper : Il y a aussi des produits marketés dans un certain sens populaire. On ne peut pas tous les mettre sur le même plan. En vérité, on ne devine pas ce qui va devenir populaire, mais ensuite, on peut le copier. 

On penserait plutôt, comme pour les 7 poètes, sauf Victor Hugo, qu’un chemin singulier expulse de fait de la société ?

Pacôme Thiellement : Le rapport de la poésie, et tout art, avec la marginalité, est une question très complexe. Il y a des périodes où il y a eu des formes d’association et d’autres de solitude extrême. Tout dépend des conditions historiques. Ces grandes figures ont été imposées par leurs pairs. Le réalisateur Jacques Rivette, dans un de ces articles, avait provoqué une polémique en évoquant un travelling qui ne méritait « que notre mépris ». On a oublié la fin de l’article où il explique l’importance des pairs pour imposer des artistes importants comme Cézanne qu’il cite en exemple. En clair, ce sont les groupes organisés qui réussissent à imposer les solitaires du siècle précédent. Jacques Rivette tient d’ailleurs une bonne place dans ce livre. C’est le moins connu des cinéastes de la Nouvelle Vague et le plus surprenant. Il est le plus inattendu et le plus exigeant avec son spectateur.

Ce sont les surréalistes qui ont imposé les poètes de la génération précédente. Il faudrait étudier l’Histoire des réceptions de chacun. On peut citer le cas de Nerval qui a été vu, pendant longtemps, comme un sympathique délirant, dont les productions artistiques devaient être perçues avec une certaine distance. À l’époque où Proust réévalue Sylvie, ce n’est pas encore gagné. Et quand les surréalistes voient dans Aurélia le grand texte de son époque, c’est neuf comme approche. 

Je ne crois pas au darwinisme culturel. On redécouvre sans cesse, que ce soit au niveau des figures historiques comme artistiques. Si les forces décisionnaires de l’époque sont académiques, elles feront des choix académiques, si elles sont révolutionnaires, elles préféreront des figures à leur image.

Pouvez-vous nous parler du lien que vous réalisez entre Paris et l’Égypte ancienne, l’une des grandes propositions du livre ?

Pacôme Thiellement : Je me suis appuyé sur les premiers historiens de Paris qui affirment que les Égyptiens sont à l’origine de la ville. Que cette proposition soit contestable d’un point de vue d’Histoire classique, je l’admets (rires), mais à partir du moment où des personnes l’ont imaginé, il y a des résonances qui se sont installées. 

L’imagination à une dimension prophétique. On a imaginé que Paris était égyptienne, et après le retour de Napoléon d’Égypte, on l’a gravé dans la pierre. Cette idée de Paris, ville de la déesse égyptienne Isis, sortie du Moyen-Âge et de la Renaissance, se trouve notamment dans le poème d’Abbon de Saint-Germain, De la guerre de Paris : « Lutèce, le nom qu’on te donne c’est Paris, tu es de la beauté d’Isis. » Paris, barque d’Isis, Parisis. 

Gilles Corrozet, qui a écrit la première Histoire de Paris au XVIe siècle, raconte une anecdote qui va être reprise encore et encore : à l’emplacement actuel du Centaure de César, dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, il y avait une statue d’Isis où les femmes parturientes venaient rendre des offrandes. Elle aurait été détruite par un évêque de la ville dans un moment de colère, estimant qu’il s’agissait d’un résidu de paganisme. Il l’a remplacé par une croix rouge qui existera jusqu’à la Révolution française. De ce passé, il reste encore la station de métro, Croix rousse, qui n’est plus desservie, mais dont on se sert pour des tournages de films. Il s’y trouve également une place, baptisée du compagnon du Général de Gaulle, Michel Debré. On la voit dans le long-métrage de Jacques Rivette, Histoire de Marie et Julien.

Œuvre du sculpteur César, installée en 1995. Angle de la rue du vieux Colombier et de la rue du Cherche-Midi, Paris 6ème.  esyckr (CC BY-SA 2.0).

Vous retranscrivez un poème, aussi peu connu que magnifique, de Baudelaire, qui s’achève, par : « Tu m’as donné de la boue et j’en ai fait de l’or. » D’où sont tirés ces vers ?

Pacôme Thiellement : C’est une esquisse pour une postface aux Fleurs du mal. C’est d’une beauté absolument démentielle, et je l’ai effectivement transcrite en entier, parce qu’elle est trop peu connue. 

Il est impossible de s’arrêter sur toutes les anecdotes et récits du livre, comme par exemple l’improbable équipe qui a milité pour une rue Robespierre à Paris, mais on peut revenir sur le chapitre consacré à Gérard de Nerval, qui est un des sommets de l’ouvrage ?

Pacôme Thiellement : Le Théâtre de la Ville, où Artaud n’a pas pu entrer et participer à sa propre célébration, est également l’emplacement où Gérard de Nerval a été retrouvé pendu. Avant les travaux de l’assommeur de dragon, Haussmann, il y a avait la rue de la Vieille-Lanterne à la place du théâtre. On a d’ailleurs identifié le lieu exact où a été retrouvé le corps de Nerval au trou du souffleur.

Nerval tient en effet une grande place dans ce livre. Je fais un lien entre l’écrivain et Saint-Denis, évêque et bâtisseur de Paris. Nerval a beaucoup traîné entre la Nouvelle Athènes et Montmartre. Montmartre où a été décapité Saint-Denis, avant de mourir sur l’île Saint-Denis, sa tête sous le bras. Pour résumer, Nerval fait une première crise dans la Nouvelle Athènes. Il voit une étoile qui veut la suivre. Il se déshabille et se retrouve emporté dans une sorte de carnaval, jusqu’à être embarqué par les gendarmes. Une première maison de santé à Montmartre, avant de sortir et de réaliser son grand voyage en Orient.

À son retour, son amour meurt et il écrit la totalité de ces livres. Il reprend tout, organise tout, A Montmartre, il a une seconde crise qui l’amène dans un hôpital. A sa sortie, il rédige Aurélia, qui est un testament, avant d’être retrouvé pendu. 

Mais il y a un doute, que partagera Baudelaire, André Hardellet, Christian Gabrielle Guez Ricord… C’est ce que je développe. Peut-être que Nerval avait trouvé l’Étoile…

Voici à présent les premières pages du dernier texte de Pacôme Thiellement, Paris des profondeurs, qui sort le 9 septembre :

© Jérôme Panconi / Seuil

Pacôme Thiellement et les 7 poètes de Paris